Première femme vice-présidente des États-Unis, femme de couleur, fille d’un père jamaïcain et d’une mère indienne, Kamala Harris a pris sa place dans l’histoire des États-Unis. Celle d’une femme issue de l’immigration qui a brisé le plafond de verre en accédant à la deuxième plus haute marche du pouvoir américain.
Kamala Harris, la femme leader
L’Amérique, le pays des possibles. Kamala Harris en est la représentation. Un exemple pour des millions de femmes et de jeunes filles américaines. Élue sénatrice en 2016, Kamala Harris, 56 ans, a été en 2004 la première femme noire procureure de San Francisco, puis la première procureure générale de Californie en 2010. Exemple flagrant de la diversité américaine, cette baptiste épouse un avocat juif père de deux enfants. Une famille recomposée tant dans l’amour que dans la différence.
Battante, elle est la digne fille d’une mère qui claque la porte de son Inde natale à l’âge de 19 ans. En quittant son pays, Shyamala Gopalan Harris, décédée en 2009, fuit un pays où la place de la femme ne correspond pas à son idéal. Devenue chercheuse en cancérologie, en Californie, la mère de Kamala Harris s’implique dans l’égalité Femme-Homme. À croire que la vice-présidente a ça dans le sang !
Lors de son discours de victoire samedi 7 novembre au soir à Wilmington, dans le Delaware. Une fille rend hommage à sa mère. « Elle croyait si profondément en une Amérique où un tel moment est possible », lance Kamala Harris. Hommage à sa mère, mais aussi aux femmes et filles américaines « femmes asiatiques, blanches, latines et amérindiennes (…) qui se sont battues et ont tant sacrifié pour l’égalité, la liberté et la justice ». Kamala Harris veut marcher dans leur sillage pour que « chaque petite fille qui regarde ce soir voie qu’il s’agit d’un pays de possibilités ».
Un héritage féministe et racial
Il en aura fallu du temps, pour écrire cette nouvelle page de l’histoire avec une femme à la seconde plus haute marche du pays.
Les États-Unis, ce pays au riche héritage de femmes noires en tant que défenderesses inébranlables de l'élargissement des droits démocratiques pour tous les Américains. En 1948, Charlotta Bass, éditrice de journaux et rédactrice en chef de l’État californien de Harris, était républicaine depuis plus de 30 ans. Elle quitte le parti par pure frustration de ne pas pouvoir trouver de soutien pour un agenda racial et sexiste et rejoint le Parti progressiste, nouvellement formé. Bass est devenue la candidate à la vice-présidence du parti en 1952, la première femme noire à être nommée par un parti national.
Vingt ans plus tard, c’est la New-Yorkaise Shirley Chisholm, membre du Congrès qui fait voler en éclats un autre obstacle en tant que démocrate. Elle devient la première femme noire à se présenter à la présidence. Antiraciste, anti-sexiste, pro-choix, pro-travailliste, anti-guerre, farouchement indépendante. Mais aucun des principaux partis politiques n’a été désireux de porter des femmes comme Bass et Chisholm.
Un dur labeur
Harris, une clé pour un avenir plus inclusif ? L’ expérience de Kamala Harris en justice pénale pourrait aider la future administration Biden à s'attaquer aux problèmes d'égalité raciale et de maintien de l'ordre après les vastes manifestations qui ont secoué le pays cette année. Elle devrait être l'une des principales conseillères en matière de nominations judiciaires. Même si elle a baigné, enfant, dans le militantisme pour une justice raciale, son positionnement oscillant entre progressisme et conservatisme a pu lui être reproché.
La première femme vice-présidente élue a promis, lors de son premier discours « un dur labeur » pour vaincre la pandémie de coronavirus, reconstruire l’économie, éradiquer le racisme, combattre la crise climatique, et, parmi les nouvelles priorités de la Maison Blanche, réconcilier un pays profondément divisé « unir notre pays et guérir l’âme de notre nation ».
En faisant entrer Kamala Harris dans l’histoire, Joe Biden fait des États-Unis un pays d’ouverture et d’égalité. Un signal clair est envoyé aux Américains, une femme a désormais brisé un plafond de verre, en accédant à la seconde plus importante position de l’administration américaine, première puissance économique mondiale. À 77 ans, Joe Biden est une figure de transition post Donald Trump, un pont entre générations, mais aussi entre cultures. Il sait que Kamala Harris, pourrait être propulsée au Bureau ovale.
Kamala Harris inspirera sans doute toute une génération de nouveaux dirigeants simplement en étant qui elle est dans ce bureau qu'elle occupera à compter du 20 janvier 2021.
Article par Rachel Brunet, rédactrice en chef du Petit Journal New York