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Sumba - “ On continue en pensant aux touristes "

Indonesie confinement touristeIndonesie confinement touriste
Écrit par Valérie Pivon
Publié le 19 mai 2020, mis à jour le 20 mai 2020

En ces temps de confinement, lepetitjournal.com de Jakarta sort de la capitale et va à la rencontre de nos compatriotes qui travaillent sur d’autres îles de l'archipel afin de connaître la situation économique et sociale de leur ville, ainsi que leur ressenti par rapport à leur activité. 

 

Nadège Le Fort installée à Sumba depuis 3 ans, propriétaire et gérante de l’hôtel Wera Beach, a répondu à nos questions. La situation est très compliquée sur cette île et l’horizon sombre pour l'année à venir. 

 

Comment avez-vous géré la situation de votre activité depuis le début de la pandémie ?

Dès début mars, nous avons compris que ça tournerait mal, et donc nous avons fait le maximum pour aider nos clients, certains soucieux de l'annulation de leurs vols, d'autres de leur santé. Nombreux coups de fils à l'ambassade de France, ou aux compagnies aériennes, on a fait au mieux pour aider nos clients ou toute personne un peu perdue sans dramatiser.

Quelles mesures avez-vous prises pour votre personnel et pour votre activité ?

Mi-mars, les annulations se sont multipliées ; la mort dans l’âme, nous avons renvoyé tout notre staff, service, cuisine, ménage et entretien de la propriété soit 5 personnes. Nous avons essayé de leur expliquer ce qu'est le Coronavirus, qui protéger en priorité, une de mes employées a un petit garçon asthmatique. Nous leurs avons expliqué pourquoi cette distanciation sociale était nécessaire.

Nous devons faire face a des problèmes de trésorerie, nous avons contacte notre banques à Sumba. Il m’a été demandé de changer ma société créée en PMA pour une société PT locale, ce qui sans aucun doute me donnerait la possibilité d'un crédit. Une fois ces démarches faites, ce qui n'est pas anodin ni gratuit : refus de crédit. Champions du monde !

Dani, mon partenaire, continue d'aller en ville pour acheter le fuel premium indispensable à l’approvisionnement de l’électricité car nous fonctionnons avec des groupes électrogènes. PLN nous demande 85 millions pour nous raccorder à leur réseau électrique alors que le coût devrait être autour de 10 millions. Nous continuons donc à acheter du fuel…

Quelle est la situation sur Sumba ? Comment se passent vos relations avec la population ? Et les autorités locales ?

Nous nous sommes mis à porter des masques bien sûr, et les rares fois où je suis allée en ville au début du confinement, j'ai vu que les gens étaient très respectueux des consignes : savon et eau claire à l'entrée des magasins, consignes affichées. Les Sumbanais voient d'un assez mauvais œil les étrangers. Depuis 3 ans sur l’île, nous sommes connus donc les gens savent que nous n'apportons pas le COVID19, mais il est clair qu’ils ont peur des visiteurs.

Pour vous donner un exemple, j'ai eu une cliente de Sumba Ouest qui est venue passer 4 jours de vacances à l'Est chez nous. Ici, chaque district applique son propre confinement, passer d'une zone à une autre sous-entend de rendre compte aux autorités locales. Pour autoriser cette dernière à séjourner à Wera Beach, mon kepala desa (chef de quartier) m'a clairement fait entendre qu’il serait bien que je fasse un "don" à sa communauté....Il m'a par ailleurs demandé d'assurer l'hébergement 14 jours (quarantaine) pour deux Sumbanais arrivant de Bali, où ils font leurs études, gratuitement bien sûr. J'ai dû refuser car nous ne sommes pas à même de produire ce service, et je ne peux pas faire prendre quel que risque que se soit à mon équipe.

Comment la situation évolue-t-elle ?

Depuis une semaine environ, on constate que les consignes sont nettement moins respectées : disparus les jerrycans d'eau et le savon… Les gens sont toujours inquiets mais ici, on n'a pas encore vu de cas sérieux. Il y a peu d’information, il semblerait qu’environ 80 personnes aient été diagnostiquées positives mais sans hospitalisation.

Les rares vols toujours disponibles, depuis Jakarta ou Bali, sont presque vides, les passagers contrôlés, prise de température, questionnaire...

Y-a-t-il des initiatives locales qui se mettent en place pour aider la population ?

Des collectes s'organisent de façon sporadique pour assurer les premiers besoins surtout alimentaires. Les Sumbanais participent, assez généreusement.

De mon côté, et après avoir découvert que les hôpitaux de Sumba Est, et c'est pareil à l’Ouest aussi, sont complètement démunis, je me suis démenée pour trouver les masques Decathlon. En fouillant la question, à Waingapu, capitale du district de l’Est, il n'y a qu’un respirateur, donc pas possible d'y adapter plusieurs masques....

Ce temps de confinement vous laisse-t-il du temps pour faire autre chose ? 

Les journées passent très vite, nous nous consacrons Dani et moi à l'entretien des trois hectares de plage devant notre hôtel. Ca signifie tondre tous les jours, entretenir et réparer des clôtures, arroser, nettoyer la plage. Nous maintenons Wera au mieux, je continue à planter, embellir... soit en pensant à l’accueil de nouveaux touristes si nous le pouvons, soit à vendre, car bien sûr il faut aussi y penser. 

Je n'ai pas trop l'esprit à la lecture, je focus sur l'idée de tenir le cap, ce qui physiquement est assez dur, moralement aussi. Je garde ma pause yoga tous les matins, c'est un point positif.

Je reste en contact avec mes amis locaux, mais uniquement sur les réseaux sociaux. Je m'isole et travaille de 9h à 17h, avec cette chaleur ça entretient ma condition physique. Et j'apprécie la chance que j'ai de pouvoir me baigner dès que j'en ai envie.

 

 

 

 

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