On y revient inlassablement. S’il est bien un plat, d’ailleurs, qui symbolise le Vietnam, au moins autant que les nems, c’est bien le pho, dont la popularité n’est plus à démontrer, mais dont les origines restent sujettes à caution…
Qu’en est-il réellement ?
Le mot « pho » se prononce comme le mot « feu » de « pot-au-feu », c’est un fait. De là à affirmer qu’il y a là un rapport de cause à effet et que le pho vietnamien serait un lointain cousin de notre bon vieux pot-au-feu bien franchouillard, il n’y a qu’un pas… que certains n’hésitent pas à franchir.
Origine du "pot-au-feu" vietnamien
Si l’on admet en effet que le pho est originaire de la province de Nam Dinh (sur ce point précis, tous les exégètes semblent d’accord), et que cette même province de Nam Dinh, qui est située à une bonne centaine de kilomètres à l’est de Hanoï, a connu, du temps de la colonie, un véritable brassage d’ouvriers vietnamiens et de soldats français, on peut à la rigueur admettre l’hypothèse… au risque de jouer avec le « pho ».
Il est vrai aussi que le pho présente quelques similitudes avec le pot-au-feu, et pas uniquement au niveau de la prononciation (il faut bien admettre aussi que pas mal de mots français ont ainsi été vietnamisés !).
Le pho est composé de nouilles de riz, de morceaux de bœuf et d’herbes aromatiques (coriandre et basilic) et de diverses épices, le tout cuit dans un bouillon de bœuf.
Et c’est justement le bœuf qui sème le trouble. Avant l’Indochine française, le bœuf était exclusivement utilisé comme bête de trait, au Vietnam. Ce sont les Français qui les premiers en ont consommé la viande, avant que cela ne devienne une habitude on ne peut plus courante. On peut dès lors se dire que la présence de boeuf dans le pho trahit une conception française.
Le Pho à travers les âges
Quoi qu’il en soit, le pho a su remarquablement s’adapter aux nombreux bouleversements qu’a connus le pays au cours du siècle passé.
Lorsque les Français plient bagages en 1954, suite aux Accords de Genève, le Vietnam est provisoirement divisé en deux. Au nord, les autorités communistes commencent par proscrire le pho, en pointant du doigt le gaspillage de riz qu’il occasionne. Mais c’est sans compter sur la roublardise de la population : très vite, la résistance s’organise de telle sorte que le pho devient un plat clandestin, sans doute d’autant plus apprécié !
Quelques années plus tard, lorsque les États-Unis interviennent dans le conflit, la viande est devenue une denrée rare. Aussi le pho en est-il privé. Non sans malice, les Vietnamiens parlent alors de « khong nguoi lai », de « pho sans pilote » ! Il faut dire aussi que c’est à cette époque que les Américains commencent à envoyer des drones pour photographier le nord du pays, et que pour la population, un avion sans pilote, c’est au moins aussi dénué de sens qu’un pho sans viande.
En 1975, la paix revient enfin sur un Vietnam réunifié mais exsangue. Le pho, lui, a survécu à la tourmente, mais il doit affronter des temps de disette. C’est ainsi, dans les années de l’après-guerre, qu’apparait le pho au poulet (pho ga), la viande de bœuf étant rationnée.
Aujourd’hui, tout va pour le mieux et le pho, lui, se porte à merveille : il pète le « pho », aurait-on envie de dire !
La recette du pho bo
A tout seigneur tout honneur. C’est du pho au bœuf (le pho d’origine donc…) que nous allons maintenant donner la recette.
Le matériel :
- 1 cul de poule
- 2 marmites
- 1 planche à découper
- 1 éminceur (gros couteau)
- 1 couteau d’office (petit couteau)
- 1 louche
- 1 paire de baguette
- 1 cuillère à soupe
- 1 cuillère à café
- 1 poêle
- 1 chinois
Les ingrédients pour le bouillon :
- 300g de flanchet de bœuf
- 500g de côte de porc
- 3L d’eau
- 3 cuillères à soupe de nuoc mam
- ½ cuillère à café de sel
Les épices :
- 3 anis étoilés
- 1 tsaoko
- 1 bâton de cannelle
- 10g de gingembre
- 3 oignons rouges
Les herbes aromatiques :
- 4 branches de basilic
- 3 branches de ciboulette
- 5 branches de coriandre
- ½ oignon
Les ingrédients pour la soupe :
- 250g de bœuf tendre émincé en tranches fines
- 500g de vermicelles de riz
- 1 citron vert
- Piment frais
Préparation d'un plat de « pho » vietnamien
Voilà pour le matériel et les ingrédients. Rentrons maintenant dans le vif du sujet, mais à « pho » doux…
Le bouillon
Mettre dans une grande marmite : 300g de plat de côte de bœuf, 500g de côte de bœuf, 3 litres d’eau, 3 cuillères à soupe de nuoc mam, et 1 cuillère à café de sel.
Chauffer à feu vif.
Bien surveiller la formation d’écume à la surface. La retirer avant ébullition afin de ne pas brouiller le bouillon. Il est important de le conserver clair.
Pendant que le bouillon mijote, attaquez-vous à la préparation des épices.
Coupez le gingembre en tranches et épluchez les 3 oignons rouges.
Ensuite, grillez le gingembre et les oignons jaunes.
Puis torréfiez les anis étoilés, le tsaoko, et le bâton de cannelle dans un poêle pendant 2 minutes avant de les mettre dans un petit sac de tissu.
Lorsque le bouillon commence à bouillir, ajoutez le gingembre grillé, les oignons grillés et les épices du petit sac dans la marmite.
Laissez mijoter pendant 3 heures.
La garniture
Lavez puis émincer finement les fines herbes (basilic, ciboulette, coriandre, oignon).
Au bout de 3 heures, retirez le flanchet de bœuf et émincez-le en tranches fines.
Faites bouillir de l’eau dans une autre casserole. Ajoutez une portion de vermicelles de riz dans un chinois, puis trempez-la dans l’eau pendant 15 secondes, avant de déposer ces vermicelles dans un bol qui sera servi.
Disposez des tranches de viandes crues et cuites sur les vermicelles du bol, et y ajoutez les fines herbes ainsi que l’oignon.
Terminez en versant du bouillon très chaud par-dessus le tout.
Le pho au bœuf est traditionnellement servi accompagné de quelques quartiers de citron vert ou de kumquat, de piment frais et de sauce piquante. Non moins traditionnellement, il constitue un merveilleux petit-déjeuner, même si de nos jours, on le déguste à toute heure du jour et de la nuit : d’aucuns prétendent même que c’est un antidote très efficace contre la gueule de bois ! A vérifier.