Association de droit thaïlandais, La France en Isan est née de l’initiative du consul honoraire de France à Khon Kaen, Jean-Michel Perroy, et elle fait figure d’exception dans le monde associatif francophone.
Il y a un an, le consul honoraire français de Khon Kaen, Jean-Michel Perroy profitait de la première fête organisée à l’occasion du 14 juillet pour introduire l’association “La France en Isan”.
Association agréée de droit thaïlandais, La France en Isan compte aujourd’hui 200 membres et a pour but d’être un point de rassemblement pour les francophones et francophiles de la région en proposant des aides administratives et sociales.
L’association a en effet mis en place plusieurs services à vocation solidaire tels qu’une assistance assurantielle, en permettant à l’un des représentants de l’association de pouvoir se substituer à l’épouse thaïlandaise pour assurer le suivi avec les assurances en cas d’hospitalisation d’urgence; une aide administrative pour s’assurer que les épouses puissent bénéficier de la pension de réversion en cas de décès de leur époux français; assistance pour remplir les déclarations d’impôts, etc.
À quelques semaines des célébrations du 14 juillet qui réuniront les Français de la région à Khon Kaen pour une seconde édition, l’association vient d’ouvrir ses locaux au bord du lac Bung Khaen Nakon et devrait proposer des cours de français dès le mois de septembre.
Lepetitjournal.com/bangkok a profité de l’occasion pour échanger avec le président de La France en Isan Jean-Michel Perroy sur les raisons qui l’ont poussé à créer une association de droit thaïlandais, les difficultés qu’il a rencontrées et les avantages de ce statut.
Qu’est-ce qui vous a motivé à monter une association de droit thaïlandais ?
Nous vivons en Thaïlande, nous ne pouvons pas monter une association de droit français loi de 1901 en Thaïlande, il ne faut pas rêver! Je voulais faire quelque chose de pérenne dans le temps et qui soit autonome. Nous vivons ici, nous allons mourir ici, nous ne sommes pas comme certains fonctionnaires qui rentrent chez eux après trois ans en Thaïlande.
Quels sont les avantages ?
On ne peut pas tellement parler d’avantages, c’est simplement que c’est la seule solution pour être en règle, pour avoir une existence juridique, pour parer à d’éventuels problèmes fiscaux, pour pouvoir organiser des manifestations. Nous avons dans l’idée d’organiser un carnaval français. De par notre statut, nous pouvons organiser des manifestations culturelles publiques. Bien sûr, il faut prévoir les autorisations de la police, etc., mais pour les démarrages, comme nous sommes une association reconnue et agréée, nous avons le droit de l’organiser.
Lorsque vous avez une association de droit français 1901, vous n’existez pas pour les Thaïlandais, dès lors comment faites-vous pour organiser quelque chose ? Vous n’avez pas le choix de le faire uniquement pour vos membres. Vous ne pouvez rien faire, même pas ouvrir un compte en banque. Moi, ce que je veux, c’est inclure la population thaïlandaise.
Est-ce que les démarches sont compliquées ? Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?
C’est la grande question du moment, tout le monde m’interroge pour savoir comment j’ai fait pour monter une association en Thaïlande. Au départ, les gens n’ont cessé de me répéter que je n’y arriverais pas, je suis donc passé dans un premier temps par une avocate thaïlandaise qui m’a dit qu’il n’y avait aucune raison que ce soit impossible. Depuis le mois de décembre 2019, nous sommes une association de droit thaïlandais présidée par un Français. A priori, nous sommes un cas presque unique en Thaïlande!
Pour y arriver, nous avons remis un dossier de 10 cm d’épaisseur dans lequel les membres fondateurs acceptent “de se mettre à nu” : il faut prouver son patrimoine, son ou ses comptes en banques, etc. En fait, les autorités doivent pouvoir vérifier que vous ne créez pas un business, que vous ne créez pas une association pour gagner de l’argent, mais bien pour rendre service. D’ailleurs dans les statuts, il faut définir à qui reviennent les actifs au cas où l’association s’arrête de fonctionner et il faut que ce soit un organisme caritatif. La France en Isan a choisi de déléguer à l’hôpital public de Khon Kaen.
Il y a beaucoup de paperasses et il faut aussi l’accord de l’ambassade de France qui doit valider que les fondateurs ne sont pas des “voyous”. Ce sont les autorités thaïlandaises qui envoient le dossier à l’ambassade, ce n’est pas de notre ressort.
Quelles sont les exigences au niveau des quotas entre les Thaïlandais et les Français ?
Au niveau légal, pour trois Thaïlandais, nous pouvons avoir maximum quatre Français, nous avons donc droit à une petite majorité. Parmi les Thaïlandais, nous avons : un doyen de l’université de Khon Kaen, un professeur de français et une officier de grade 6. L’officier de grade 6 fait partie des conditions pour monter une association thaïlandaise. Cette femme est professeure à l’école d’infirmière et traductrice, elle parle donc français, ce qui nous arrange bien!
Est-ce compliqué de trouver ce genre de profil ?
Il faut chercher, connaître du monde, avoir des relations, être ouvert et ne pas vivre dans son coin.
Quelles sont les autres contraintes qui existent ?
Dans les agréments que nous avons eus, il n’y a qu’une seule exclusion, assez curieuse et que je n’explique pas, mais nous ne pouvons pas organiser de tournoi de billards, c’est la seule chose qu’on ne peut pas faire. Le reste, tant que nous restons dans la loi thaïlandaise, il n’y a pas de problème.
Nous prévoyons d’organiser des cours de langues et pour cela nous devons faire les démarches pour l’homologation des locaux, pour obtenir la licence pour dispenser des cours…
Que prévoyez-vous pour la suite ?
Nous voudrions essayer d’obtenir des aides de l’Etat français en tant qu’organisme d’entraide et de solidarité ou en passant par l’ambassade de France à Bangkok. Parce qu’à ce niveau-là, nous ne sommes pas aidés ni reconnus, nous ne sommes même pas sur la liste des associations sur le site de l’ambassade de France. Nous avons envoyé un courrier, mais nous n’avons pas eu de réponse.
Le 31 juillet, j’aurais 70 ans, ce qui signifie que je vais terminer ma fonction de consul honoraire le 30 juillet. Personne n’est encore nommé pour me remplacer. Par contre, je continue au sein de l’association La France en Isan.