La Saint Valentin, fête des amoureux, est-elle célébrée en Inde, un pays très pudique et surtout très attaché à ses traditions et au mariage ? Lepetitjournal tente d’en savoir plus.
Oui, les indiens fêtent leur amour
C’est sûr, l’amour et la sexualité sont ancrés dans la culture indienne depuis des millénaires, notamment par le texte érotique le plus célèbre, le kamasutra. De plus. Et, si on cherche un peu du côté des croyances, il existe même l’équivalent indien de notre cupidon, le dieu hindou de l’amour Kamadeva qui lance ses flèches de fleurs à l’aide d’un arc en canne à sucre.
Mais c'est dernièrement que la Saint-Valentin est devenue largement reconnue en Inde. L’influence de la télévision, les offres promotionnelles des commerçants, l’ouverture du pays aux nouvelles technologies et la jeune génération plus aisée et voyageuse ouvrent un peu les chakras concernant la Saint Valentin. Des restaurants ou hôtels commencent timidement à organiser des évènements dédiés aux amoureux. Bon, il ne faut pas pousser, ce n’est pas un jour férié mais un moment privilégié où l’on s’offre des fleurs ou des mots doux. En revanche, les étreintes en public ne sont pas courantes, rappelons que les Indiens sont très pudiques, surtout quand il s’agit d’exprimer ses sentiments ou de s’embrasser en public. A ce propos, vous verrez très peu de rapprochements amoureux dans les films Indiens, même si les intrigues tournent beaucoup autour de l'amour et du couple !
Mais c’est encore une fête très controversée
Le 14 février est en effet vu comme une fête qui va à l’encontre de la culture indienne : cela pousse notamment à l’acte sexuel, strictement interdit avant le mariage (union généralement arrangée par les parents ndlr). Chaque année, des actions sont menées comme brûler des cartes de vœux, mettre à sac des fleuristes ou prendre à partie un bar ou un restaurant organisant un évènement. En 2018, une université l'Uttar Pradesh avait même décidé de fermer ses portes et interdit les étudiants à se rendre sur le campus. L’an dernier, les autorités du Karnataka ont demandé solennellement aux parents d‘élèves de veiller à ce que leurs progénitures ne se laissent pas gagner par la célébration de la Saint-Valentin.
Mais le plus grave, ce sont les actes de violence à l’encontre des couples non mariés ou unis entre castes. On ne peut que rappeler la tragique histoire de Ramesh et Gangamma, deux jeunes mariés (et parents), lapidés pour s’être aimés entre castes. Des faits divers insupportables pour certains comme Abhijeet Kamble, fondateur de l’ONG « Right to Love », créée en 2015 et qui tente d’agir contre les mentalités et les violence à l’encontre des amoureux. « Il y a des gens en Inde qui s'indignent même lorsqu'un frère et une soeur ou un couple marié marchent ensemble dans la rue ! s'indigne-t-il. Mais l'amour n'est pas un crime. Nous voulons un parc ou les garçons et filles qui sont amoureux peuvent passer du temps ensemble en paix et apprendre à se connaître. » Un autre exemple, c’est Love Commandos, une organisation à Delhi, qui exfiltre les amoureux interdits, les met à l’abri, apporte une aide juridique et aide à repartir à zéro, loin des leurs mais surtout…des menaces.
Ainsi, choisir de célébrer la Saint Valentin en Inde, c’est un peu comme faire un pied de nez aux traditions et défendre le droit de s’aimer, quelle que soit son origine, sa religion ou sa caste.