La semaine dernière, la visite Varsovie Accueil nous a emmenés dans le Ghetto de Varsovie. Bien qu'il n'en reste presque plus rien, du fait de la démolition totale de ce dernier en mai 1943 par les Allemands, notre guide, Alicja Parvine, nous a raconté l'histoire de plusieurs figures emblématiques du ghetto afin de mieux comprendre l'horreur qu'ont vécu plus de 460.000 Juifs.
Pour commencer, quelques chiffres sont utiles à rendre compte d'une terrible réalité: 360.000 Juifs de Varsovie (un quart de la population varsovienne de l'époque), auxquels se sont ajoutés 100.000 Juifs de la région, sont enfermés dès octobre 1940 dans le quart nord-ouest de la ville. Ce sont des murs qui pouvaient atteindre quatre mètres de hauteur pour trois d'épaisseur, construits par les Juifs eux-mêmes sur ordre des Allemands. Et pour finir, ce sont déjà 100.000 morts de faim ou pour cause de maladies (épidémies de typhus..), le 22 juillet 1942, avant la déportation de 300.000 autres juifs du Ghetto au camp d'extermination de Treblinka.
Quelques morceaux du mur qui emprisonnait la population juive de Varsovie restent encore intacts, mais il faut savoir où les trouver au milieu des cours des immeubles, reconstruits directement sur les décombres. Entre les rues Zlota et Sienna (parties gauches quand nous sommes sur l'avenue Jana Pawla II, et que nous laissons la Gare centrale derrière nous), nous avons en avons découvert deux portions. Sur l'une d'elle, le plan du Ghetto montre que celui-ci était composé de deux parties, la petite vers le sud et la plus grande au nord, reliées par une passerelle, célèbre grâce à de nombreuses photos. Plusieurs briques ont été ôtées du mur pour être envoyées dans différents musées à travers le monde, notamment en Israël et aux États-Unis. Comme sur les tombes ou dans de nombreux lieux de commémoration juifs, nous pouvons y voir les cailloux posés en signe de recueillement.
La seconde partie de notre parcours nous emmène dans le quartier de Muranow, où le Musée de l'Histoire des Juifs polonais a ouvert cette année pour les soixante-dix ans de l'Insurrection du Ghetto. Tout autour, de nombreuses plaques, statues et autres stèles rappellent et honorent la mémoire de personnages symboliques dans la lutte contre l'oppresseur nazi. Notre guide nous a conté l'histoire d'une d'entre elles, Irena Sendlerowa, aide sociale, non juive, qui, de par sa profession, pouvait entrer dans le ghetto. Elle a fait sortir clandestinement plus de 2000 enfants, afin de les confier à des s?urs et qu'ils soient placés dans des familles en Pologne ou bien à l'étranger, la grande majorité de ces enfants étant devenus orphelins.Non loin de là, une statue grandeur nature de Jan Karski rend hommage au célèbre émissaire du gouvernement polonais en exil, qui s'était rendu clandestinement en Pologne, et notamment dans le Ghetto de Varsovie, pour témoigner du déroulement de l'extermination des Juifs. En 1943, il a été en Grande-Bretagne, puis aux Etats-Unis, pour y raconter les horreurs dont il avait été le témoin direct et demander de l'aide. Il s'est heurté à l'incrédulité des dirigeants étrangers, qui ne pouvaient pas croire en ce qu'ils apprenaient.
Le long des rues qui relient le Musée jusqu'à l'Umschlagplatz, la gare d'où partait les trains vers Treblinka, des blocs noirs saluent la mémoire de nombreux résistants. C'est la « Voie de la mémoire, de la martyrologie* et du combat des Juifs ». Elle passe à côté de l'ancien bunker dans lequel se sont cachés les insurgés pendant leurs actions, avant d'être découverts par les Allemands. C'est dans ce bunker que s'est suicidé Mordechaj Anielewicz le 8 mai 1943. La gare aujourd'hui n'existe plus, à sa place un monument rend un dernier hommage aux 300.000 Juifs qui sont partis d'ici pour leur dernier voyage.
*traduit directement du polonais, « martyrologie » n'existe pas en français
Remerciements à:
Varsovie Accueil: http://varsovieaccueil.pl/
Notre guide, Alicja Parvine: alicja.parvine@gmail.com
Mathilde Tête (www.lepetitjournal.com/varsovie) ? Mercredi 13 novembre 2013
Crédits photos : Alicja Parvine et Mathilde Tête