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LITTERATURE - Romain Gary et la Pologne (Episode 1)

Écrit par Lepetitjournal.com Varsovie
Publié le 29 juin 2015, mis à jour le 30 juin 2015

 

L'écrivain Romain Gary (1914-1980) a vécu dans plus de dix pays, dont la Pologne, entre 1921 et 1927. La Pologne occupera une place importante dans ses oeuvres, notamment dans son premier roman Education Européenne, publié en 1945. Mais alors que la biographie officielle évoque à juste titre l'âme russe de Romain Gary, quel impact eurent ses années polonaises sur lui ? Et quels lieux de Varsovie portent encore la trace de l'écrivain? Enquête.

Roman Kacew, dit Romain Gary, est né le 8 mai 1914 à Vilnius et mort le 2 décembre 1980 à Paris. Compagnon de la libération, romancier, aviateur, diplomate et cinéaste, il fut également connu pour la grande mystification littéraire qui le mena, vers la fin de sa vie, à signer plusieurs romans au style très moderne sous le pseudonyme d'Émile Ajar. Il est le seul romancier à avoir jamais reçu deux fois le prix Goncourt, sous son nom de plume habituel en 1956, et sous celui d'Émile Ajar en 1975. Ce n'est qu'après sa mort que le public apprit que lui et Ajar n'étaient qu'une seule et même personne.

Enfance en Pologne

Mina Owczy?ska, sa mère, est actrice dans un théâtre français de Moscou, son mari Lejba, propriétaire d'un magasin de fourrures, est peu présent dans la vie du foyer. C'est une « francophile enragée » (Cf Sources, entretien avec André Bourrin) qui voudrait que son fils naisse en France... Enceinte, elle entreprend le voyage mais doit s'arrêter dans sa famille à Vilna (nom Russe de Vilnius) et c'est là que Roman Kacew naît en mai 1914. Peu de temps après, la Première Guerre mondiale éclate, et au lieu du départ vers la France, c'est le rapatriement de force vers les steppes de Russie, en tant que Juifs, soupçonnés en groupe par le Tsar de collaborer avec les Allemands... Survivant successivement à la guerre, à la révolution bolchévique, et enfin à la guerre soviéto-polonaise, Roman, Mina et Lejba Kacew se rejoignent en 1921 à Wilno (nom polonais de Vilnius), en Pologne.

En 1926, le père Lejba abandonne définitivement le foyer. Mina et Roman partent seuls pour Varsovie. Le jeune Roman fréquente l'école polonaise Michal Kreczmar rue Wilcza, 41. A la presse, il dira plus tard qu'il est allé au lycée français, par respect pour sa mère, qui ne put y financer les études de son fils. On sait que Roman et sa mère habitaient au n° 22 de la rue Pozna?ska, chez le frère de celle-ci, l'avocat Boleslaw Owczy?ski. Ces bâtiments n'existent plus aujourd'hui. A Varsovie, sous l'influence de sa mère, il découvre le théâtre, la littérature polonaise, il « apprend le polonais à fond » (Cf Sources, entretien avec André Bourin) et découvre un certain sens de l'humour, celui de cette Pologne juive et cosmopolite. Il écrit ses premiers poèmes en polonais. Il suit assidûment la chronique humoristique hebdomadaire du poète Antoni S?onimski dans Wiadomo?ci Literackie (hebdomadaire libéral et satirique très apprécié dans les cercles de l'intelligentsia Varsovienne) et continuera à se faire envoyer le journal une fois en France.

« De cette manière encore aujourd'hui je reste sous le charme de l'humour polonais, du moins de celui spécifique de la Varsovie d'avant guerre, volapük polono-juif, qui jusqu'à maintenant reste ancré dans ma mémoire; » (Cf Sources, entretien avec Kolodziejczyk)

De la Pologne à la France de la résistance

Mais la Pologne n'était qu'une étape. En 1928, Roman et sa mère arrivent en France et s'installent à Nice, où Mina devient hôtelière. Roman devient Romain. Nouveau pays, nouvelle langue. Après son bac philosophique obtenu principalement grâce à une très bonne note en français, Romain étudie le droit à Paris tout en passant ses étés à suivre des cours de langues slaves à Varsovie où il « vivait pour rien », logeant chez ses cousins de la rue Nalewki. Naturalisé Français en 1935,  il renonce à la nationalité polonaise. Il passe le plus clair de son temps à écrire, et un premier roman est refusé par les éditeurs.

En 1938, il est appelé au service militaire, et est en poste à Bordeaux quand la Seconde Guerre mondiale éclate. D'abord officier de liaison entre les armées française et polonaise il s'évade de Bordeaux vers Alger pour rejoindre la France de Londres. Pendant ses années de résistance, il fréquente les pilotes polonais de la Royal Air Force, connus pour avoir les meilleures statistiques de combat. Dans La Promesse de l'Aube (1960), il raconte comment l'un d'eux le provoque en duel, et se gardant bien de montrer qu'il a vécu en Pologne, il leur déclame finalement avec un parfait accent varsovien ce qu'il pense d'eux, sauvant l'honneur de la France et de la Pologne en même temps.

Retrouvez le second épisode de Romain Gary et la Pologne dans notre édition de demain

Sources:
Entretien en polonais avec Leszek Kolodziejczyk, novembre 1980, texte inédit en français.
Entretiens avec André Bourin : Le nomade multiple - Les Grandes Heures Ina / Radio France,  1969

Matthieu Rubio (lepetitjournal.com/Varsovie) - Mardi 30 juin 2015

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Publié le 29 juin 2015, mis à jour le 30 juin 2015

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