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Brexit : ce qu'il fallait retenir de la conférence du 10 octobre

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frederick tubiermont - unsplash
Écrit par Pauline Berger
Publié le 12 octobre 2020, mis à jour le 10 décembre 2020

Samedi après-midi s'est tenue sur Zoom la conférence à destination des Français vivant au Royaume-Uni, "Et maintenant que dois-je faire ?", au sujet de la sortie imminente du Royaume-Uni de l'Union Européenne (UE).

Elle était organisée par Nicolas Hatton, délégué consulaire et directeur de l'ONG The3Million, principale ONG pour informer et répondre aux problématiques rencontrées par les citoyens européens vivant au Royaume-Uni. Ses invités étaient le sénateur français et député à l'Assemblée des Français à l'étranger, Olivier Cadic, et l'avocate spécialisée dans les affaires des migrations, Marie-Christine Rousse.

Des questions similaires à celles qui se posaient déjà en 2016

Samedi avait lieu la deuxième réunion publique organisée par Hatton afin de répondre aux inquiétudes des Français au Royaume-Uni, quant à la sortie imminente de l'UE. La première avait été organisée en juillet 2016. Quatre ans ont passé et pourtant, les mêmes interrogations se répètent notamment par rapport à la nécessité de pouvoir prouver son statut de résident.

C'est l'objectif de l'ONG The3Million. Elle se bat depuis 2016 pour la création d'un document physique certifiant le statut de résident. Pour l'instant le document est uniquement numérique. "Si jamais il y a le moindre problème informatique, la personne concernée n'a plus de quoi prouver qu'elle réside légalement au Royaume-Uni", s'insurge Nicolas Hatton. Après le 31 décembre 2021, ce sujet risque de devenir un vrai problème.

Les modalités incertaines du futur accord de sortie

"J-82 avant la sortie du Royaume-Uni de l'Union Européenne, et toujours personne ne sait ce que le Brexit va signifier. Même en cas de signature d'un accord ambitieux, il faut que chacun s'attende à des changements automatiques de grande ampleur pour les citoyens, les consommateurs, les entreprises, les administrations publiques, les étudiants, les investisseurs, les chercheurs", avertit le sénateur Cadic.

Ce qui ressort de cette conférence est un sentiment d'incertitude et une méfiance vis-à-vis du futur accord de sortie. De nombreuses questions restent en suspens, "il faut attendre la signature de l'accord pour savoir comment tout va se passer". C'est le cas notamment des retraites, dont les conditions exactes ne seront connues qu'à l'issue des négociations sur un futur partenariat entre la France et le Royaume-Uni, au sujet des coûts des droits à la retraite par exemple.

Le sujet de la fiscalité est également très vague encore aujourd'hui. Le sénateur Cadic rappelle qu'il existe une convention fiscale de non double imposition entre les deux pays. Néanmoins, par principe, un pays peut dénoncer une convention fiscale. "Ces questions ne peuvent pas être inscrites dans le marbre, elles dépendront de la nouvelle majorité au Royaume-Uni, je n'ai pas de réponses encore."

Le sénateur craint également que la problématique de la débancarisation des Français à l'étranger se développe. Certains citoyens français vivant hors de France ont vu leur compte bancaire français se fermer. Cela survient à cause du coût trop élevé pour les banques de l'administration de ces comptes. En effet, elles doivent les contrôler pour s'assurer que leurs propriétaires ne font pas du blanchiment d'argent. Le Royaume-Uni devenant un pays tiers, c'est-à-dire un pays hors de l'UE, ce risque va sûrement augmenter. Monsieur Cadic rappelle toutefois que le droit au compte bancaire est un droit pour tous les Français vivant en France et à l'étranger, et conseille d'aller visiter le site de la Banque de France pour plus de détails.

Enfin, la question du permis de conduire a été abordée. Le sénateur n'avait pas de réponse précise à donner car la décision dépendra de chaque État. Il affirme toutefois que, pour l'instant, il n'y a pas d'inquiétudes à avoir de ce côté-là. Il sera normalement toujours possible de conduire au Royaume-Uni avec un permis français à partir du 1er janvier 2021.

Un nombre de demandes de settled status insuffisant et inquiétant

Pour connaître les différences entre les deux seuls statuts de résidence valables après le 31 décembre 2020 au Royaume-Uni, le settled status et le pre-settled status, vous pouvez lire cet article du PetitJournal.com de Londres.

Nicolas Hatton rappelle ce nombre inquiétant : seulement 140 000 demandes de settled status ont été réalisées par des Français vivant au Royaume-Uni. Pourtant, la communauté française est évaluée à plus de 300 000 personnes selon France Diplomatie. À partir du 1er juillet 2021, 160 000 Français risquent donc d'être en situation irrégulière au Royaume-Uni, même s'ils vivent depuis plusieurs années dans le pays.

La nécessité de régulariser son statut de résident au plus vite

C'est l'information absolument essentielle de cette conférence.

En théorie, après cinq ans de résidence au Royaume-Uni, tout citoyen européen devient citoyen permanent. Cette modalité sera obsolète à partir du 31 décembre 2020. Il deviendra alors nécessaire d'obtenir son settled status ou son pre-settled status pour continuer de résider légalement au Royaume-Uni, avant le 30 juin 2021.

L'avocate Marie-Christine Rousse rappelle que le gouvernement britannique a mis en place un délai supplémentaire jusqu'au 30 juin 2021 pour laisser le temps aux citoyens européens d'obtenir leur statut. Néanmoins, si vous n'avez pas de statut de résidence au 1er juillet 2021, vous serez considéré comme un résident illégal, peu importe depuis combien de temps vous vivez au Royaume-Uni. Vous perdrez donc le droit de travailler au Royaume-Uni, d'avoir un permis de conduire anglais, d'avoir un compte bancaire, de louer un logement, et vous n'aurez plus accès aux soins gratuits ni aux allocations.

Sachez également que la carte de résidence permanente, ou permanent residency en anglais, ne sera plus valable pour justifier de votre statut de résident légal au Royaume-Uni. Le settled status et le pre-settled status seront les seuls documents reconnus par le Home Office.

L'avocate avertit également les détenteurs d'un pre-settled status. "On ne sait pas encore s'il sera possible de renouveler de façon indéfinie le pre-settled status. À partir du 31 décembre 2020, il ne faudra pas casser la continuité de sa résidence au Royaume-Uni pour ne pas perdre son pre-settled status. Il faudra pouvoir prouver que vous avez résidé de manière continue au Royaume-Uni pendant au moins six mois, donc que vous n'avez pas été absent pendant au moins 180 jours d'affilée."

"À partir du 31 décembre 2020, l'objectif pour les détenteurs d'un pre-settled status est d'obtenir leur settled status", préconise Marie-Christine Rousse. Pour ce faire, il vous faudra justifier de cinq ans de résidence au Royaume-Uni sans absence de plus de six mois.

Nicolas Hatton précise que pour demander un des deux statuts, vous devez avoir une pièce d'identité en cours de validité. Si ce n'est pas le cas, rendez-vous rapidement au consulat. Il conseille également de s'y enregistrer gratuitement, ce qui facilitera toutes les démarches administratives auxquelles vous pourrez être confronté.

De plus, si vous avez changé de passeport depuis que vous avez obtenu un des statuts, il est nécessaire d'actualiser le numéro de passeport inscrit sur le document numérique justifiant de votre condition de résident au Royaume-Uni. En effet, le douanier ne pourra accéder à votre statut de résidence en ligne qu'avec un numéro de passeport valide.

Revenir en France pour Noël, un risque à ne pas prendre selon les conférenciers

De nombreux participants prévoyaient en effet de rentrer en France pour Noël, et de revenir en janvier au Royaume-Uni. La réponse des conférenciers diffère en fonction du statut de résidence des Français concernés. Si vous possédez déjà votre settled status, vous ne rencontrerez pas de problèmes lors du passage des frontières. Nicolas Hatton conseille toutefois de se rendre sur le site de The3Million sur lequel vous pourrez remplir un document justifiant du statut de résidence que vous possédez. Valable un an, il est recommandé de voyager avec.

"Durant les premiers jours, il n'y aura pas trop de check up car le Home Office ne sera pas capable de faire face aux files d'attente qu'il créerait s'il s'amusait à différencier qui a le droit ou pas de résider au Royaume-Uni". Marie-Christine Rousse affirme en effet que, jusqu'au 30 juin 2021, les autorités de l'immigration ne vérifieront pas les statuts de résidence des citoyens européens franchissant la frontière. D'après elle, il sera impossible de différencier quelqu'un qui a fait une demande de statut d'une personne qui n'en a pas faite.

Néanmoins, son discours est radicalement différent à l'adresse des Français ne possédant pas de statut. "Si j'étais dans le cas d'une personne ayant fait une demande de pre-settled status ou de settled status, et étant dans l'attente d'une décision, je ne partirais pas en France pour Noël car je ne fais pas confiance au gouvernement. Tout peut dépendre de l'humeur de l'officier de l'immigration", met en garde Madame Rousse. "Si je n’étais pas blanche je serais d'autant plus inquiète, car les personnes de couleur risquent de se faire davantage questionner sur leur droit de résider en Angleterre", déplore l'avocate.

Pour plus d'informations sur les nouvelles modalités auxquelles les citoyens européens risquent de faire face après le 31 décembre 2020, n'hésitez pas à vous rendre sur le site de The3Million.

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