L'ANC, au pouvoir en Afrique du Sud depuis trente ans, se dirige vers un revers historique aux législatives, les résultats à 85% du dépouillement annonçant la perte de sa majorité absolue à l'Assemblée et l'obligation de former un gouvernement de coalition.
A 20H00 GMT, le Congrès national africain (ANC) recueillait 41,12% des voix comptabilisées, selon la Commission électorale (IEC), restant sous la barre cruciale des 50%. Le parti avait remporté 57% des suffrages aux dernières législatives, en 2019.
Le premier parti d'opposition (Alliance démocratique, DA, centre libéral) cumule pour l'instant 21,95% des suffrages. Le tout récent parti populiste Umkhonto We Sizwe (MK) du sulfureux ex-président Jacob Zuma, fait une percée à 13,5%, tandis que les radicaux de gauche des Combattants pour la liberté économique (EFF) stagnent à 9,4%.
La participation s'établit actuellement à 58,47%, en baisse par rapport aux 66% enregistrés au précédent scrutin. Les résultats définitifs ne sont pas attendus avant samedi au plus tôt.
A l'issue du scrutin, le plus disputé de l'histoire de la démocratie née dans le pays avec l'élection de Nelson Mandela en 1994, 400 députés seront élus. Ils désigneront le prochain président.
Depuis le début du dépouillement mercredi soir, les résultats partiels ont reflété les prévisions des experts et enquêtes d'opinion des dernières semaines, qui accordaient entre 40% et 47% des intentions de vote à l'ANC.
La désillusion des 62 millions de Sud-Africains, nourrie par un chômage endémique, une pauvreté croissante et une criminalité record, semble avoir vaincu la loyauté tenace envers le parti qui a libéré le pays du régime de ségrégation raciale.
Pour nombre d'électeurs, le parti qui a longtemps incarné le rêve d'une nation ayant accès à l'éducation, au logement et aux services de base, n'a pas tenu ses promesses.
Le quotidien est empoisonné par des coupures récurrentes d'eau et d'électricité. Et les scandales de corruption à répétition impliquant de hauts dignitaires du parti ont abîmé la confiance.
- Pays zoulou aux mains de Zuma -
Le parti historique, qui détient actuellement 230 sièges de députés (57,5%), devrait rester la plus grande formation politique à l'Assemblée nationale. Affaibli, il devra se résoudre à nouer des alliances et tenir des négociations sur la formation d'un gouvernement de coalition.
Experts et observateurs ont encore du mal à prédire quelle pourrait être la formule mais des responsables de partis ont déjà fait part de leur avis.
"Nous n'engagerons pas de discussion avec l'ANC de Cyril Ramaphosa", a martelé le porte-parole du MK, Nhlamulo Ndhlela. "Nous dialoguerons avec l'ANC mais pas avec l'ANC de Cyril Ramaphosa".
L'ANC devra en effet choisir entre faire des concessions avec la DA, qui a promis de "Sauver l'Afrique du Sud" à coup de privatisations et dérégulations. Ou s'il se risque à un rapprochement avec l'EFF et ses revendications incendiaires comme la redistribution des terres aux noirs et la nationalisation de secteurs économiques clefs.
Le parti devra aussi déterminer s'il est prêt à un pacte avec le MK, dirigé par l'ancien pilier de l'ANC Jacob Zuma déclaré inéligible. Mais le fossé entre le président Cyril Ramaphosa et son prédécesseur zoulou Jacob Zuma, ennemis politiques de longue date, sera difficile à combler, anticipent les spécialistes.
Le MK est en passe de remporter la province zouloue (Est), fief traditionnel du parti au pouvoir et province essentielle rassemblant plus de 20% de l'électorat. Il y est en tête avec près de 45,5% des voix contre à peine plus de 18% pour l'ANC.
Une victoire franche du petit parti dans la région porterait un coup supplémentaire à Ramaphosa, 71 ans, qui compte sur un second mandat mais dont le maintien pourrait être compromis si les résultats décevants de son parti se confirment.