Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 1
  • 0

"Nos objets préférés au musée" : Prasasti Lonthoir

En attendant la réouverture du Musée National de Jakarta, nos guides francophones de l'association Indonesian Heritage Society nous partagent leurs coups de cœur.

Crédit @AnneSophieQuillisCrédit @AnneSophieQuillis
Crédit @AnneSophieQuillis
Écrit par Lepetitjournal Jakarta
Publié le 22 avril 2024, mis à jour le 7 mai 2024

Prasasti Lonthoir par Anne-Sophie Quilis

Qu’est-ce qu’un Prasasti ? Un prasasti est une inscription faite pour durer, souvent sur de la pierre. Ce pilier en pierre, de 1.65m, est un Padrão. C’est une borne utilisée par les explorateurs portugais à travers le monde. En effet, ils avaient pour habitude de graver des pierres et de les ériger en guise de revendication territoriale. Celle-ci date du 16e siècle.

Ce Padrão a été trouvé à Lonthoir, sur l'île de Banda Besar, dans les îles Moluques. Ces îles sont aussi connues sous le nom "d'îles aux épices", en particulier pour le clou de girofle, la noix de muscade et le macis (fine enveloppe entourant la noix appelée "fleur de muscade").

Sur la partie inférieure du Padrão, il y a 17 lignes gravées en portugais que l'on peut à peine lire. On distingue seulement une date 1557 ou 1577 ?

La partie supérieure a été gravée plus tard, sur le Padrão existant, sur les armoiries portugaises (probablement un globe et une croix) par les Hollandais avec ces mots : "Ce garde-corps en pierre a été fait par ordre de Jan Van den Broeke en 1705".

Il s’agit en fait d'une borne de délimitation d'une plantation de noix de muscade. Ce Padrão révèle surtout l'histoire du contrôle du commerce de la noix de muscade entre les Portugais et les Hollandais. À l'époque pré-moderne, la noix de muscade n'était cultivée que sur les îles Banda et son commerce apportait aux habitants une grande richesse. 

Cette épice arrivait en Europe via les marchands de Chine et du Moyen-Orient. Elle y était très populaire depuis le XVème siècle, pour ses valeurs culinaires, médicinales et aussi en parfumerie. Son prix dépassait même celui de l’or !

 

Un peu d'histoire 

Pour les raisons citées ci-dessus, les Européens veulent mettre la main sur le marché de la noix de muscade. Au tout début du XVIème siècle (1512), les Portugais, experts en navigation et en construction navale, arrivent les premier aux Moluques. L'Indonésie est bien connue pour être une ancienne colonie néerlandaise, mais n’oublions pas que les Portugais étaient présents dans l'archipel près d'un siècle auparavant pour contrôler le marché des épices et étendre le catholicisme. 

À la fin du XVIe siècle (1599), les Hollandais atteignent les Moluques. Ils sont accueillis avec respect par le peuple de Banda qui essayait de trouver un allié pour se débarrasser des Portugais. Ensemble, ils chassent les Portugais. Malheureusement, les Hollandais ont des idées bien arrêtées sur le commerce de la noix de muscade et imposent leurs exigences en utilisant la force militaire. 

La population de Banda se rend rapidement compte que sa situation est pire qu'avant. En effet, les Hollandais détruisent les villages des régions côtières et la plupart des habitants sont tués, bannis, forcés de fuir ou utilisés comme esclaves.

La VOC (Compagnie Néerlandaise des Indes Orientales) donne à ses marchands les 68 parcelles pour les cultiver et les entretenir. Ces planteurs hollandais de noix de muscade sont appelés Perkeniers en néerlandais, Jan Van den Broeke étaient l’un d’entre eux.

Les Néerlandais continuent à gouverner l'île jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, bien que l'importance économique de la noix de muscade diminue considérablement en raison de la perte du monopole néerlandais. En effet, les Britanniques réussissent à planter des muscadiers dans d'autres parties du monde, en particulier à Penang en Malaisie et à la Grenade, à la fin du XVIIIe siècle.

Cette borne en pierre est le témoin de la colonisation et de l'avidité des colonisateurs à l'égard de la population locale. 

 

Flash infos

    Pensez aussi à découvrir nos autres éditions

    © lepetitjournal.com 2024