C’est par le plus grand des hasards, qu'Altunay Ağaoğlu, médecin généraliste à Izmir, est "entrée" en homéopathie. Elle fut l’une des premières en Turquie à exercer officiellement en tant que médecin homéopathe.
Ces dernières années, Altunay Ağaoğlu a été présidente de la Classical Homeopathy Association de Turquie, et lors du congrès international des homéopathes qui s’est tenu à Istanbul en octobre 2022, elle a été élue présidente de l’Organisation mondiale de l’homéopathie – LMHI - qui regroupe et représente des homéopathes de 76 pays, médecins, pharmaciens, dentistes, vétérinaires.
Une découverte "fortuite" de l'homéopathie
"[…] Après des études primaires et secondaires en Allemagne, je suis rentrée à Izmir, ma ville d’origine pour suivre des études de médecine à l’université de l’Egée. J’ai obtenu mon diplôme de médecin en 1997. A cette époque, je ne me voyais pas devenir médecin généraliste de quartier, ou travailler de façon conventionnelle dans un hôpital, je cherchais une autre voie et j’ai eu l’opportunité de rejoindre des membres de ma famille qui s’occupaient d’une école pour enfants handicapés où mon statut de médecin pouvait être utile. Un jour, une maman m’apporta un drôle de médicament, constitué de petits granulés blancs réunis dans un tube, en me demandant ce que c’était… Je n’en avais aucune idée… C’est une doctoresse allemande qui nous l’a donné, m’expliqua-t-elle. Étant germanophone et curieuse, j’ai voulu en savoir plus, et c’est ainsi que j’ai rencontré Rita Kaya, 'l’allemande' qui avait prescrit ce remède. Rita qui était médecin, formée en Allemagne, vivait à Izmir et son accueil fut des plus chaleureux : "Vous êtes médecin et vous parlez l’Allemand ? Je vais vous apprendre l’homéopathie" [...]"
C’est ainsi que jeune médecin de formation classique, Altunay Ağaoğlu a découvert l’homéopathie, inventée en 1796 par l'Allemand Samuel Hahnemann, une spécialité peu connue en Turquie, et dont on ne parlait pas à l’université. Rita l’a initiée à cette médecine, qui s’intéresse d’abord au patient dans son entier, et non aux pathologies en particulier.
Une médecine dite douce, utilisant des remèdes préparés à partir de souches d’origine végétale, minérale et animale, et qui contrairement aux remèdes allopathiques ne provoquent pas d’effets secondaires. Une médecine conçue pour réguler le pouvoir d’auto guérison du corps, stimuler le système immunitaire, en travaillant sur l’équilibre énergétique, physique, psychique du patient et non uniquement sur les symptômes liés à sa maladie. Chaque patient est différent et même avec un diagnostic identique, le remède peut être différent !
En 1999, forte de cette initiation, Altunay Ağaoğlu a obtenu une bourse et une invitation pour se rendre en Allemagne et suivre une formation auprès du docteur Gerhard Bleul, un professeur exceptionnel récemment disparu, et qui chaque année accueillait uniquement deux ou trois médecins turcs germanophones, dont il n’acceptait pas d’argent.
Après avoir suivi plusieurs de ses stages, de retour à Izmir, c’est avec Rita Kaya qu'elle a pu développer cette activité d’homéopathe, tolérée mais non autorisée à l’époque s’agissant d’une spécialité médicale non reconnue. Dès 2012, elle a contribué comme Conseillère auprès du ministère de la santé, à l’élaboration d’une réglementation pour reconnaitre et autoriser la pratique de l’homéopathie en Turquie et mettre en place avec les universités la formation des homéopathes.
Sur le marché turc, les remèdes arrivent au compte-goutte
En 2014, le Dr Altunay Ağaoğlu a ouvert officiellement sa clinique dans le quartier d’Alsancak à Izmir, l’homéopathie étant devenue légale pour les médecins diplômés sous réserve qu’ils aient suivi une formation encadrée par une université turque. Les mêmes conditions s’appliquant aux pharmaciens, dentistes et vétérinaires homéopathes. Concernant les remèdes, ce fut un peu plus compliqué car l’autorisation de les produire ou de les importer n’a été promulguée que l’année dernière, et pour le moment aucun laboratoire ou importateur n’a sollicité d’autorisation gouvernementale pour les mettre sur le marché. Chaque médecin ou pharmacien continue d’apporter sa propre pharmacopée homéopathique à l’occasion de ses voyages en Europe, aux Indes, en Asie, etc.
Il y a actuellement en Turquie 700 médecins homéopathes, dont une majorité de femmes, mais avec les dentistes, pharmaciens et vétérinaires on arrive à près d’un millier de professionnel(le)s de la santé pratiquant l’homéopathie. En Turquie la majorité des homéopathes sont unicistes, c’est-à-dire qu’ils_elles n’utilisent en principe qu’un seul remède par patient au contraire des pluralistes qui peuvent en utiliser plusieurs selon les pathologies.
Pour le Dr. Altunay Ağaoğlu, qui œuvre pour le développement de l’homéopathie depuis vingt-cinq ans, cette médecine alternative, devient de plus en plus populaire en Turquie, bénéficiant d’un soutien au plus haut niveau de l’état, et d’une équipe extrêmement motivée au sein du ministère de la santé, dite médecine complémentaire, qui travaille très sérieusement sur ce sujet, voyageant à travers le monde afin d’étudier les différentes pratiques.
> On peut trouver ici une liste d’homéopathes en Turquie
> Pour en savoir plus, vous pouvez consulter deux ouvrages de l’homéopathe français, Philippe Servais, publiés aux éditions Josette Lyon :
- Qu'est-ce que l'homéopathie uniciste ? - Ce presque rien qui vous guérit
- Homéo portraits, histoires de remèdes