À l’occasion des Jeux Olympiques de Tokyo, le Club France Initiative s’est penché, avec l’aide de l’ancien champion olympique et homme politique français, Jean-François Lamour, sur la question du rayonnement et de l’influence du sport français dans le monde et de l’intérêt d’organiser des événements sportifs.
La France est depuis longtemps une grande puissance sportive et accueille régulièrement des événements et compétitions internationales. Elle dispose de nombreuses perspectives diplomatiques et économiques via la «diplomatie sportive», qui est utilisée comme un outil de «soft power», soit la capacité d’un État à influencer et à orienter les relations internationales en sa faveur par un ensemble de moyens autres que coercitifs.
Le sport joue un rôle politique et international majeur et de nombreux grands événements sportifs ont contribué à faire évoluer les politiques étrangères et nationales. La coupe du monde de rugby de 1999 en Afrique du Sud sous Nelson Mandela, qui appuya sa politique de rassemblement post-apartheid sur la victoire de cette compétition, en est un bon exemple. Mais que peut-on vraiment capitaliser avec l’organisation des JO ? Quelle influence le sport et les sportifs français ont à l’étranger ? Jean-Francois Lamour, champion olympique d’escrime et ancien ministre des Sports, s’est exprimé sur le sujet pour le Club France Initiative.
Quelle est l'influence de la France dans le sport ?
Premier constat et pas des plus flatteurs, selon Jean-François Lamour, l’influence du sport français dans le monde est relativement faible pour un pays de notre envergure. Nous sommes seulement entre le «7ème et 10ème rang olympique » admet-il.
Le «manque de représentativité au Comité olympique international (CIO)», est l’un des problèmes principaux que rencontre la France sur la scène du sport mondiale, car elle «détermine l’influence et le poids que peut avoir une nation sur une compétition», explique le champion olympique de 1984 à Los Angeles et de 1988 à Séoul. «Nos seuls représentants français au CIO sont Tony Estanguet, Jean-Christophe Rolland et Guy Drut», continue-t-il et avec la fin du mandat de Tony Estanguet le 8 août prochain, la France va devoir s’appuyer sur uniquement deux membres, au sein du CIO. À titre d’exemple, la Grande-Bretagne ou les États-Unis comptent quatre membres chacun.
L’autre problème majeur est notre réseau diplomatique qui «n’utilise pas du tout le rayonnement sportif» comme outil politique et de soft power. «Ce n’est pas dans l’ADN de nos ambassadeurs», précise Jean-François Lamour et cette absence de «prise en compte de cette réalité sportive manque cruellement pour alimenter le rayonnement du sport français à l’international». Une tendance qui commence à s’inverser puisque depuis quelques années, le quai d’Orsay a imposé un «référent sport» dans chaque ambassade.
Zidane, Teddy Riner, ... les sportifs français, nos meilleurs ambassadeurs ?
La France bénéficie d’immenses champions qui possèdent des auras très importantes, nous permettant ainsi d’entretenir notre réputation sportive à l’étranger. En football, Antoine Griezmann est l’archétype de ses athlètes influenceurs, avec ses 33,8 millions de followers sur Instagram et ses apparitions publicitaires pour des grandes marques comme Gillette ou Head & Shoulders.
D’autres personnalités françaises importantes comme Sébastien Ogier, en rallye, Martin Fourcade en biathlon, Kylian Mbappé en football ou encore Teddy Riner en judo ont également une influence considérable dans le monde du sport. Ils deviennent les portes drapeaux de la France à travers le monde et l’incarnent de manière positive. Dans certaines nations, les sportifs sont parfois les personnalités les plus connues à l’international, comme Novak Djokovic avec la Serbie.
Des sélections étrangères font également souvent appel à l’expertise des entraineurs français, notamment en escrime au JO de Tokyo, où Gregory Koenig s'occupe de l'équipe d'escrime d'Hong Kong et Hugues Olbry de celle chinoise. Le monde du football est aussi très friand des entraineurs français, comme Zinédine Zidane avec le Real Madrid, Arsene Wenger avec Arsenal, Thierry Henry, l’actuel coach de l’équipe de Belgique ou encore Hervé Renard, double vainqueur de la coupe d’Afrique des Nations avec la Zambie en 2012 ou encore la Côte d’Ivoire en 2015.
Que peut apporter l’organisation des JO de Paris 2024 au soft power français ?
Les avantages sont nombreux à organiser une compétition sportive internationale, surtout économiquement. Mais les profits qui sont engendrés par des championnats du monde ou des JO à Paris par exemple, sont bien plus conséquents. Ils permettent notamment aux régions où ils se déroulent, de se dynamiser autant au niveau social qu’environnemental. Cette stimulation sociétale va en conséquence «permettre d’accroitre l’intérêt de la population du pays d’accueil pour le sport et ainsi inciter et créer de nouvelles vocations chez les plus jeunes. Le poids du pays en question, sur la scène mondiale, est aussi considérablement renforcé» explique Jean François Lamour.
Les compétitions internationales et les Jeux Olympiques sont la plupart du temps très lucratifs, à titre d’exemple, les JO peuvent rapporter jusqu’à 11 milliards d’euros de retombées économiques. Pour Paris 2024, l’impact économique que prévoit le Centre de droit et d'économie du sport (CDES) de Limoges est de l’ordre de 8,1 milliards d’euros pour un scénario médian. Les domaines qui en profiteront le plus seront le secteur de la construction qui devrait gagner de 1 à 1,8 milliard d’euros mais surtout celui du tourisme, qui devrait bénéficier de 1,4 à 3,5 milliards d’euros. Quant aux entreprises partenaires de Paris 2024 qui contribueront à l’organisation des JO, elles devraient engranger jusqu'à 5,4 milliards d’euros et créer entre 119.000 et 247.000 emplois en Ile-de-France. La situation sanitaire sera, comme pour Tokyo, au coeur des préoccupations, puisqu’une grosse des recettes qui sont encaissés lors des JO proviennent des billetteries.