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Loang Him Kao, projet pas si utopique de communauté d'artisanat durable à Chiang Mai

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Loang Him Kao - Le marché de Cham Cha accueille les visiteurs tous les samedis et dimanches matins
Écrit par Catherine Vanesse
Publié le 31 mai 2021, mis à jour le 31 mai 2021

Réunir une communauté d’artisans thaïlandais dans un même quartier de Chiang Mai, tel était le rêve du professeur Chatchawan Thongdeelert. 

Depuis un peu plus de trois ans, les visiteurs affluent tous les week-ends au marché de Cham Cha dans le district de San Kamphaeng, à l’est de Chiang Mai. À l'ombre d'un gigantesque arbre de pluie (Cham Cha), les vendeurs locaux proposent divers produits, notamment des aliments, des boissons, de l'artisanat, des vêtements et des souvenirs. De temps en temps, le marché accueille également des événements tels que Folk for a While, un spectacle de musique folklorique et d'artistes locaux ou encore le festival Ton Yon.

Pour autant, le marché de Cham Cha n’est que la partie la plus visible, car derrière ce rendez-vous hebdomadaire, on découvre Loang Him Kao. En dialecte local, Loang signifie communauté et Him Kao se traduit par le bord de la rivière Kao. 

Cette communauté est née il y a 15 ans sous l'impulsion de professeur Chatchawan Thongdeelert. “Tout a démarré quand j’ai proposé à des amis qui partageaient la même passion que moi pour l’art et l’artisanat d’acheter ensemble un terrain au bord de la rivière Kao”, explique-t-il. L’objectif était de créer une communauté basée sur l’économie d’autosuffisance promue par le roi Rama IX tout en préservant des traditions artistiques et en promouvant un mode de vie durable. 

Chatchawan Thongdeelert
Chatchawan Thongdeelert est le leader de la communauté Loang Him Kao mais aussi un activiste environnementale et président du Chiang Mai Breath Council - Catherine Vanesse

Village d'artisans

Parmi la vingtaine de membres, on retrouve des personnes originaires des quatre coins de la Thaïlande - Chatchawan est lui-même originaire de Kanchanaburi et a fait de Chiang Mai sa ville d’adoption il y a plus de 30 ans. Chacun d'eux s’est vu attribuer un morceau de terrain et a commencé à construire son habitation. Les maisons sont généralement inspirées de l’architecture traditionnelle lanna.

Chacun est libre de construire sa maison ou son atelier comme il l’entend, mais il faut néanmoins respecter certaines règles en termes de hauteur des maisons ainsi que dans les matériaux, puisque l’idée est d’être durable et de promouvoir l’artisanat”, précise Chatchawan qui est également président du Chiang Mai Breathe Council, une organisation citoyenne ayant pour objectif de réduire la pollution dans les zones rurales et urbaines en rassemblant différents groupes d’activistes environnementaux, des académiciens et des ONG.

Dans les premières années après sa fondation, les artistes et artisans utilisaient leur maison seulement comme habitation et atelier pour produire leur création avant de vendre leur produit sur les marchés ou dans des boutiques du centre-ville de Chiang Mai. Ce n’est réellement qu’avec l’ouverture du restaurant Meena Rice en 2015 qu’ils ont réalisé que les clients, touristes et locaux, n’avaient aucun problème à venir jusque dans leur communauté pour venir manger.

Loang Him Kao
Juste à côté du marché se trouve la rue Loang Him Kao où les artisans vivent et vendent leurs créations tous les jours de la semaine - Photo Solène Dartus

L'éclosion de la "rue bleue"

Nous sommes situés à une quinzaine de kilomètres à l’est du centre-ville de Chiang Mai", explique Chatchawan Thongdeelert. "Nous étions persuadés que les visiteurs n’étaient pas prêts à faire autant de route, mais nous avions tort!" 

Le restaurant, qui s’est vu attribuer l'an dernier un BIB Gourmand dans le Guide Michelin 2020, attirait tellement de monde que les habitants ont peu à peu cessé de vendre leurs produits en ville et ont commencé à ouvrir leur atelier et boutique au public dans cette rue désormais baptisée Loang Him Kao ou encore la "rue bleue". Ce nom vient du fait que l'une des spécialités de la rue est l’indigo que l’on peut découvrir chez Slow Stich, un magasin d'accessoires de décoration et de vêtements ou encore chez Anda Indigo Chiang Mai, spécialisé dans les sacs et vêtements aux tons bleutés.

Fort de l'affluence générée par le restaurant, Chatchawan lance en 2015 le festival Ton Yon pour promouvoir sa communauté et les artistes qui y vivent, même s'invite d’autres artisans et vendeurs de Chiang Mai. Ton Yon se déroule chaque année sur trois jours à la période de Loy Krathong (Loy Krathong a lieu lors de la pleine lune du 12ᵉ mois du calendrier lunaire, généralement en novembre).

Naissance du marché de Cham Cha

Le festival rencontre un succès immédiat suscitant des demandes de la part du public, mais aussi d'agences de voyages pour que l’événement ait lieu plus régulièrement. C’est ainsi que le marché hebdomadaire de Cham Cha démarre. En parallèle, chaque boutique commence à organiser régulièrement des ateliers pour s’initier à l’art de l’indigo, de la broderie ou de la cuisine lanna. 

carte loang him kao

Avant le début de l’épidémie du coronavirus, le marché était particulièrement fréquenté par les touristes. Il faut dire qu’il se situe non loin du village de Bor Sang, connu pour ses ombrelles de papier et bambou.

La fermeture des frontières et les mesures de restrictions pour lutter contre l’épidémie du coronavirus entre avril et juin 2020 ont été particulièrement éprouvantes pour les commerçants de Loang Him Kao. Depuis le mois de juillet, et mis à part les restrictions qui ont de nouveau été mises en place en décembre 2020 puis encore en avril-mai 2021, la communauté s’estime plutôt satisfaite d’avoir réussi à séduire un public plus local. 

"Communauté durable"

Avant le Covid-19, nous avions beaucoup de touristes, surtout des Chinois. Maintenant nous avons des gens de Bangkok, mais aussi plus de résidents de Chiang Mai”, commente Oussa, propriétaire du Bus Pizza. “Il y a un réel esprit communautaire ici et en même temps chacun reste indépendant en termes d’activité professionnelle, de revenus et d’intimité puisque nous avons tous notre habitation”, ajoute la trentenaire. 

Lorsque l’on demande à Chatchawan comment il envisage l’avenir de cette communauté, le sexagénaire s’inscrit dans la continuité : “dans quelques années, j’imagine que notre communauté s'inscrira de plus en plus dans un mode de vie simple et paisible. Nous continuerons à créer des œuvres d’art uniques tout en s’activant pour une communauté durable en plantant plus d’arbres et en encourageant le recyclage, voir en valorisant les déchets à travers l’art”. 

C’est en effet le sentiment qui ressort lorsque l’on se promène entre les échoppes du marché ou que l’on passe le seuil de la porte de l’une ou l’autre maison pour observer les créations des différents artisans. Ne soyez pas surpris si après quelques paroles échangées on vous invite à vous asseoir pour prolonger la discussion ou être invité à un cours d’initiation de broderie ou de confection de bijoux tout en sirotant un café glacé. 

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