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Accéder à l’éducation supérieure publique en Inde : un parcours très sélectif

Liliam vit à Chennai depuis 2021. Son fils fait partie des très rares étrangers à avoir choisi d’intégrer un cursus d’ingénierie en Inde. Cette situation exceptionnelle l’a poussée à s’intéresser à l’éducation supérieure dans le pays et en particulier au système d’accès aux universités.

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Des candidats passent le JEE Main. Photo : National Testing Agency
Écrit par Liliam Boti Llanes
Publié le 1 juin 2023, mis à jour le 15 avril 2024

Son bac en poche, mon fils a choisi de poursuivre ses études supérieures en Inde, où nous vivons depuis près de 2 ans. Une situation très exceptionnelle : il est le seul élève d’un pays occidental sur le campus de son université, VIT Chennai, l’une des plus grandes universités privées du Tamil Nadu, qui compte plus de 30 000 élèves.

En moyenne, pour les études universitaires de premier cycle, chaque année, 10 étudiants étrangers rejoignent les IIT (Indian Institutes of Technology, très réputés) en plus des 16 000 élèves indiens. Ils ne se bousculent pas non plus dans les universités privées !

Depuis deux ans, nous avons donc des informations de première main sur la vie quotidienne d’un étudiant en ingénierie en Inde. Et au fil du temps, je me suis de plus en plus intéressée à l’éducation supérieure et en particulier au système d’accès aux universités du pays, bien différent de ce que nous avions connu en France avec Parcoursup, au Portugal et en Espagne.

 

L'accès à l’éducation supérieure en Inde : un système très compétitif

La première chose à retenir est que l’Inde a l’un des systèmes les plus compétitifs pour accéder à l’enseignement supérieur public, les enjeux étant vraiment très élevés.

Pour intégrer les cursus scientifiques les plus prestigieux, les étudiants indiens doivent se soumettre, à la fin de la Terminale, au Joint Entrance Exam (JEE) Main. En 2023, plus de 1 100 000 candidats uniques se sont présentés aux deux sessions du JEE Main

Après avoir passé cette première étape, les 250 000 meilleurs candidats sont admis à passer le JEE Advanced, la deuxième étape du parcours du combattant pour obtenir une place dans un IIT (Indian Institute of Technology) ou un autre institut public. Parmi eux, 16 000 à peine seront admis.

 

Le graal pour devenir ingénieur : intégrer un des 23 Indian Institutes of Technology

Les IIT sont des établissements publics d'enseignement supérieur spécialisés dans l'ingénierie et les technologies. Créés en 1961 par le gouvernement central indien, les IIT sont considérés comme les meilleurs établissements de formation d'ingénieurs en Inde. Leur qualité est également reconnue à l'étranger, notamment aux États-Unis, où de nombreux Indiens talentueux, ayant contribué dans divers domaines, en sont issus. En 2005, le Congrès américain a rendu hommage aux IIT, faisant d'eux la seule université étrangère à recevoir une telle reconnaissance.

23 instituts existent aujourd'hui et ils partagent le même concours d'admission.

Ces instituts sont reconnus pour la formation subventionnée de haute qualité qu’ils proposent, les possibilités de carrières offertes aux diplômés et le haut niveau de recherche scientifique qu’ils soutiennent.
 

IIT Madras Research Park at Chennai. Photo : Tushraa CC
IIT Madras Research Park at Chennai. Photo : Tushraa CC


Les examens d’accès sont très compliqués, le programme long et exigeant, et les élèves se préparent pendant des années. Le concours est fondé sur un processus d’élimination plutôt que de sélection. En 2021, 57 des 114 questions du JEE Advanced ont reçu une réponse erronée de plus de 90% des candidats. Et dans le cas de 6 questions de maths, moins de 2% des candidats ont donné la réponse correcte.

Le taux d’acceptation des IIT pour les cours de premier cycle est autour de 0,5 %.  À titre de comparaison, il est de 4 à 5% à l’Université de Harvard et tourne autour de 10 ou 15% à l’Ecole Polytechnique de Paris, avec seulement 25 000 candidats.

Intégrer une formation dans le domaine médical : le parcours du combattant

Pour ceux qui postulent dans le domaine médical (parcours le plus convoité du pays avec l’ingénierie), la situation est semblable. Les étudiants doivent passer le NEET-UG, qui est une passerelle unique pour l’admission à divers cours de premier cycle dans le domaine de la médecine.

En 2023, plus de 2 millions de candidats se sont présentés pour environ 90 000 places.

Le premier grand défi pour les élèves est donc de faire partie de ces 4,5% d’admis.

 

Des concours réunissant des millions de candidats

Les chiffres donnent le vertige, et une question vient vite à l’esprit : comment prendre en charge cet énorme nombre de candidats ? Comment organiser les concours pour qu’ils se déroulent au mieux ?

Les directives concernant le concours sont publiées un an à l’avance. Cette année, le bulletin de la NTA (Agence National des Examens) comprenait 131 pages. Parmi elles, plusieurs étaient consacrées au code vestimentaire.

 

Le jour J : bijoux, broderies et manches longues interdits

Pour commencer, les étudiants ne sont pas autorisés à porter des chaussures, seulement des sandales ouvertes. Sont interdits aussi les vêtements clairs à manches longues, les bijoux et accessoires, y compris les boucles d’oreilles, anneaux de nez, bagues, pendentifs, bracelets ou tours de cheville. Sont à proscrire également les vêtements avec des poches, avec des broderies élaborées, des fleurs, des broches ou de gros boutons.

La fouille des candidats est obligatoire, et ceux qui portent des articles ou des objets religieux doivent se présenter au centre d’examen au moins deux heures à l’avance pour qu’une fouille appropriée puisse être menée.  

Et quand le jour J arrive et que toutes ces directives doivent être appliquées, des situations parfois ubuesques peuvent se présenter…

 

Candidates at the NEET examination center. Photo : National Testing Agency
Candidats au concours du NEET. Photo : National Testing Agency


Des candidats forcés de changer de pantalon à l’entrée du centre d’examen

Récemment, en 2023, des candidats ont allégué qu’ils avaient été forcés de changer de vêtements, de les porter à l’envers ou de les échanger avec leurs parents. Certains ont dû troquer en catastrophe leur jean pour des leggins car les poches ne sont pas autorisées. Quelques candidates affirment avoir vu les bretelles de leur soutien-gorge examinées, tandis que certains garçons ont dû entrer dans leur centre d’examen en sous-vêtements, car les pantalons qu’ils portaient n’étaient pas autorisés. L’année dernière, dans le Nord de l’Inde, des manches longues ont été coupées sur place par des policiers.

Et quand toutes les fouilles, le passage au détecteur de métal et le reste sont terminés, place à l’un des concours d’entrée les plus difficiles sur terre !

Bon courage les Terminales indiens !

Le JEE Advanced 2023 est prévu pour dimanche 4 juin.

 


Un parcours d’accès différent pour les candidats étrangers

À savoir, si votre enfant souhaite poursuivre des études supérieures en Inde : les étudiants étrangers, très peu nombreux, suivent un chemin différent et moins exigeant que les étudiants indiens.

 

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