Enfants autistes au Cambodge : défis et besoins croissants

Des besoins non satisfaits en matière d'éducation spécialisée au Cambodge

Selon des données de 2019, le nombre d'enfants autistes aurait franchi la barre des 20 000 dans le pays. Cette augmentation est largement attribuée à une meilleure sensibilisation et compréhension de l'autisme parmi les parents et les professionnels de santé.

Cependant, les lieux d’éducation spécialisée demeurent insuffisants. Chan Sarin, dont l'école est accréditée par le gouvernement, dispense un enseignement aux enfants atteints de troubles du spectre autistique (TSA) de la maternelle à la 12e année. L’école spécialisée de Takhmao, dans la province de Kandal, ne peut accueillir qu'une fraction des enfants demandeurs.“Nous avons plus de 600 demandes, mais l'école n'a de place que pour 300 élèves. C'est pourquoi il est prévu de construire un nouvel établissement pour accueillir 200 élèves supplémentaires d'ici 2025 ou 2026”, explique le directeur. 

Au Cambodge, 86 classes d'intégration qui soutiennent les élèves atteints de déficiences intellectuelles et d'autisme existent dans 26 villes. Cette intégration concerne un total de 942 élèves, dont 301 filles. Le programme compte 178 enseignants. L'expression "classe d'intégration" fait référence à une école comprenant des classes pour les élèves autistes, et non à une école séparée pour ces élèves. Ces classes forment les enfants handicapés et atteints de TSA de la première à la douzième année et les aident à se présenter à l'examen du diplôme de fin d'études secondaires.

Le nombre d'enfants autistes qui pourraient poursuivre leurs études à l'université n’est cependant pas connu. De même, Kata Orn, porte-parole du ministère du travail et de la formation professionnelle, a refusé de répondre aux questions relatives à l'emploi des jeunes autistes.

Sensibilisation et lutte contre la discrimination

Sopaul Somalis, mère d'un enfant autiste, a expliqué à CamboJA qu’elle constate une plus grande ouverture d’esprit face à l'autisme aujourd'hui qu'il y a cinq ans, lorsque ce handicap n’était pas compris par la population. Cependant, bien que les efforts de sensibilisation s'intensifient, la discrimination envers les personnes autistes persiste.

Ainsi, les parents d'enfants autistes exhortent le gouvernement et les ministères concernés à promouvoir la sensibilisation à ce handicap et à renforcer la protection des enfants handicapés afin de réduire la discrimination à leur égard. Ils appellent également à augmenter le nombre d'écoles d'éducation spécialisée, telles que des écoles publiques et des écoles d'organisations non gouvernementales, afin d'aider ceux qui n'ont pas les moyens d'envoyer leurs enfants handicapés dans des écoles privées.

Hoeur Sethul, président de l'Association cambodgienne des conseillers et des psychologues, rappelle que selon le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) de l'Association américaine de psychiatrie, l'autisme est une condition congénitale, ce qui signifie que les enfants naissent avec. “Les parents peuvent généralement remarquer des signes de comportement autistique chez leur enfant entre l'âge d'un an et un an et demi”, souligne-t-il.

Selon Hoeur Sethul, les enfants autistes présentent souvent des difficultés dans leurs interactions sociales et peuvent être sensibles à divers stimuli sensoriels tels que le goût, le toucher, l'ouïe, la vue et l'odorat. Le DSM classifie le trouble du spectre autistique en quatre catégories : léger, modéré, légèrement sévère et sévère.

“Il existe un manque de compréhension du TSA au Cambodge, avec seulement 30% de la population qui possède une connaissance de cette condition, un chiffre bas par rapport aux pays développés”, souligne Hoeur Sethul.

“Il est essentiel d’éduquer la population à ce sujet et d'encourager la communication avec les professionnels de la santé pour une meilleure prise en charge des enfants autistes.”

"Certains parents pensent que les enfants autistes peuvent être guéris, mais il n'y a pas de remède. Les enfants autistes ont besoin d'une aide à long terme, sur l'ensemble de leur vie", rappelle-t-il. “Le Cambodge manque encore de spécialistes et de services axés sur les consultations avec les parents d'enfants autistes”. 

Défis de collecte de données et de planification

Le manque de données précises sur l’autisme entrave la planification des politiques et des services au Cambodge. Sun Ratana, directeur du département de la protection des personnes handicapées du ministère des affaires sociales, a déclaré qu'il n'était pas possible de connaître le nombre exact d'enfants autistes dans le pays car le recensement n'était pas encore disponible.“Il faudra dix ans pour achever le recensement, qui a débuté en 2020.” précise-t-il. 

"Nous devons collecter des données sur le nombre d'enfants autistes dans le pays et les enregistrer dans une base de données nationale, afin d’être en capacité de fournir des services d'éducation spécialisée."

Sur la base de ces données, le gouvernement sera en mesure d'adapter les besoins en à la demande.

La réalisation de recensement comporte des difficultés, en raison du manque de volontaires pour collecter les données et du fait que certaines personnes ne sont pas disposées à partager ces informations.

Selon l'Organisation mondiale de la santé, en novembre de l'année dernière, un enfant sur 100 serait autiste dans le monde. Cette estimation représente un chiffre moyen. Certaines études font état de chiffres nettement plus élevés.