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Blocage de l’information sur les risques des mines de plomb

Pose d'un poster sur le Covid-19 dans la région de MagwéPose d'un poster sur le Covid-19 dans la région de Magwé
Les posters sur le Covid-19 sont autorisés, pas ceux sur les mines de plomb
Écrit par Rédaction lepetitjournal.com Birmanie
Publié le 5 mai 2020, mis à jour le 6 mai 2020

L’usage de poster sur vinyle pour communiquer avec les populations souvent coupées des réseaux de communication – soit que la téléphonie mobile n’arrive pas jusqu’à elles, soit que leur alphabétisation n’est pas suffisante pour qu’elles accèdent à la complexité de certains messages – est une méthode prisée en Birmanie. C’est d’ailleurs l’un des moyens de lutte contre le Covid-19 mis en place dans certaines régions, comme celle de Magwé où dans la circonscription de Gangaw des posters ont été posés présentant des gestes d’hygiène de base et pourquoi ils sont nécessaires afin de protéger contre l’épidémie.

Mais lorsque ce moyen d’information est utilisé à des fins didactiques mais sans contrôle de l’Etat, cela soulève souvent d’un seul coup des difficultés, comme celles observées dans les villages de Kontha et Kayanthaya, près de Loikaw, la capitale de l’état de Kayah. Des posters sur les conséquences de l’extraction minière du plomb ont et créés et affichés dans ces deux lieux par des villageois et par la branche locale de la Myanmar Alliance for Transparency and Accountability (Mata) – une organisation de la société civile qui lutte contre la corruption et les projets nuisibles à l’environnement qui ne rapportent rien aux populations locales, si ce n’est des ennuis…

Or, l’état de Kayah est connu à la fois pour l’important potentiel des ressources de son sous-sol et pour les libertés qu’y prennent les entreprises minières au détriment des gens qui vivent là, comme sur le tristement célèbre site de Mawchi. Parmi ces « libertés », celle de limiter par tous les moyens la sensibilisation et l’information des habitants sur les conséquences néfastes de l’extraction minière. Et il est prévu qu’une centaine d’hectares de terres agricoles autour de Kontha et Kayanthaya soient bientôt transformée en mine de plomb, l’une des industries minières les plus polluantes. De nombreux villageois sont contre et cherchent à s’organiser pour lutter légalement et pacifiquement contre cette exploitation à venir. D’où les posters.

Lesquels posters, posés le 1er avril, ont été retirés de force par des individus arrivés sur les lieux en mobylettes et qui ont décliné de s’identifier auprès des villageois, même après que le chef du village – autorité administrative légale – leur a demandé de quel droit ils opéraient. La réponse fut « celui de hautes autorités. Mais ils n’ont fourni aucunes preuves ou documents », témoigne un habitant. Et lorsque des militants de Mata et des villageois ont voulu remettre leurs posters dès le 2 avril, c’est finalement la direction régionale de la Santé qui est intervenue pour leur interdire cette action « car les rassemblements de plus de cinq personnes sont interdits », alors même que deux personnes suffisent pour poser correctement ces posters…

La question des abus de pouvoir au nom de la lutte contre le Covid-19 anime désormais un débat dans de nombreux pays, y compris la France. Et en Birmanie des organisations de la société civile ont déjà soulevé la question de la restriction des libertés individuelles que pose les mesures de lutte contre le Covid-19. Dans ce cas du Kayah, le détournement du droit de rassemblement afin d’empêcher l’information de la population ne pourra que susciter encore un peu plus un rejet déjà fort du gouvernement local nommé par Nay Pyi Taw et donc des institutions fédérales.

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