Entre activisme jugé radical, différends politiques et engagement citoyen, comment l’Allemagne de 2023 se place-t-elle en matière de lutte climatique ?
Le 4 mars dernier, les militants de Letzte Generation jetaient un produit noir, semblable au pétrole, contre le monument « Grundgesetz 49 », situé en face du Bundesrat, pour alerter sur le non-respect du gouvernement de ces articles constitutionnels qui assurent protéger la vie humaine. Les activistes avaient ensuite collé par-dessus des affiches avec le slogan « Pétrole ou droits constitutionnels ? ». Cette protestation a été vivement critiquée par l’ensemble de la classe politique, y compris Les Verts, qui la juge anti-démocratique.
Un activisme jugé trop radical
C’est le nouveau débat en Allemagne : peut-on tolérer cette nouvelle forme d’activisme climatique qui bouscule les codes ? Le groupe "Letzte Generation" a notamment attiré l’attention ces derniers mois par plusieurs actions de désobéissance civile, en bloquant de grands axes routiers ou en projetant différentes substances sur des tableaux dans des musées. Si les personnalités politiques jugent leurs actions comme criminelles, ils s’inscrivent pourtant parfaitement dans la ligne de la philosophie de désobéissance civile avec un refus d’attaquer les personnes, une volonté d’éviter les dégâts matériels et une ligne non violente affirmée, même si ces actions créent du désordre et des frustrations.
Du côté des citoyens, le blocage des routes apparaît souvent injuste et est décrit comme une forme de coercition. Si les activistes n’ont reçu que des amendes pour le moment, leurs initiatives pourraient avoir des suites judiciaires avec l’ouverture fin 2022, par un parquet régional, d’une enquête contre des militants « soupçonnés de former ou de soutenir une organisation criminelle ».
Des différends politiques entre l’Allemagne et l’Union européenne
Seul dirigeant d’un pays du G7 venu assister au forum de Davos cette année, Olaf Scholz a notamment félicité l’Allemagne d’avoir réussi à s’affranchir du gaz russe en un an, du fait de la guerre en Ukraine. Mais un autre enjeu est sur la table politique allemande et européenne en ce moment : le plan climat de l’UE sur les émissions de CO2. L’Union européenne souhaite interdire les moteurs à combustion d’ici 2035. Malgré une première approbation du texte, l’Allemagne bloque désormais le projet pour l’ensemble des pays partenaires. Le chancelier allemand Olaf Scholz a en effet exprimé son soutien à Volker Wissing (FDP), ministre des Transports, qui menace de bloquer le vote final sur l’interdiction de facto par l’UE des nouvelles voitures à essence ou diesel à partir de 2035.
L’Allemagne veut une réponse plus claire sur la possibilité d’immatriculer après 2035 des véhicules à moteurs à combustion mais avec des carburants de synthèse neutre pour le climat. Pour le moment, l’UE n’a pas donné d’avis sur la question. Ursula Von Der Leyen, venue assister à la retraite annuelle du gouvernement allemand au château de Meseberg le 5 mars dernier, est restée assez vague sur le sujet : « Je veux être très claire une fois de plus : nous soutenons pleinement le principe de l’ouverture technologique. C’est important, mais il doit toujours être équilibré avec les objectifs de notre politique climatique, sur lesquels nous sommes tous d’accord », a-t-elle expliqué.
Guter Austausch und viel Einigkeit mit der Bundesregierung in #Meseberg
— Ursula von der Leyen (@vonderleyen) March 5, 2023
Wir stehen weiter fest an der Seite der Ukraine, wir machen Europa unabhängiger von fossilen Brennstoffen.
?? ist führend bei sauberen Technologien. pic.twitter.com/QX8kgYan8t
Les citoyens berlinois prennent les choses en main
Lassés de l’inaction politique, les citoyens berlinois décident de prendre les choses en main et organisent, le 26 mars prochain, un référendum sur le climat intitulé « Berlin 2030 neutre pour le climat ». Le projet est tourné vers trois objectifs : produire notre propre énergie dans la région berlinoise et dans le respect de l’environnement pour être indépendant ; renforcer l’économie régionale et créer des emplois d’avenir ; atteindre la quasi neutralité carbone en 2030, comme cent autres villes européennes, pour prendre ses responsabilités vis-à-vis des générations futures.
Pour voter, il faut avoir 18 ans, avoir la nationalité allemande et être inscrit à Berlin. Le vote se passera à distance le 26 mars et vous pouvez dès à présent demander à ce que l’on vous envoie le matériel pour l’effectuer. Ce référendum devrait permettre de changer directement la loi, qui obligera le Sénat à réduire de 95 % les émissions nocives pour le climat à Berlin d’ici 2030 et ce, de manière socialement équitable, puisqu’elle stipule (la loi) que les loyers nets plus élevés doivent être compensés.
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