La crise politique s'est nettement aggravée hier alors que le Premier ministre devait tenir son discours de politique générale. Au moins une personne a été tuée et 410 blessées dans des affrontements entre policiers et manifestants antigouvernementaux qui ont organisé un blocus du Parlement à Bangkok
Hier matin à l'aube, la police a dispersé les manifestants de l'Alliance du Peuple pour la Démocratie (APD) qui s'étaient rassemblés devant le Parlement pour empêcher le Premier ministre Somchai Wongsawat de tenir son discours de politique générale. Les policiers assurent n'avoir utilisé que des gaz lacrymogènes, mais certaines blessures auraient été provoquées par des explosifs, selon des médecins.
Parlementaires coincés
Somchai a malgré tout réussi à lire son discours et à avaliser le nouveau gouvernement, même s'il a été boycotté par les parlementaires de l'opposition, qui ont dénoncé une "utilisation excessive de la force".
Un peu plus tard, les protestataires sont revenus à la charge, cette fois pour empêcher les députés de sortir du Parlement, dont ils ont réussi à bloquer toutes les issues pendant plusieurs heures.
Le Premier ministre et quelques ministres ont réussi à partir en escaladant les grilles, mais des parlementaires et des membres du gouvernement sont restés coincés dans le bâtiment.
Pendant toute la journée, la police a tenté de disperser les milliers d'opposants en faisant abondamment usage de gaz lacrymogènes, parfois en tirs tendus, selon des témoins.
Ce n'est que dans l'après-midi que les forces de l'ordre ont réussi à débloquer certains accès, permettant aux députés de s'enfuir à bord de véhicules qui les attendaient.
Des manifestants ont pour leur part renversé des véhicules de police et utilisé des armes à feu dans certaines avenues autour du Parlement transformées en champ de bataille.
Les manifestants ont endommagé des véhicules de la police et blessé 8 policiers dont quatre par balles. En tout plus de 400 personnes ont été blessées et au moins une tuée dans les affrontements d'hier (Photo Pierre Queffélec)
Au moins un mort, 410 blessés, l'armée en renfort mais pas de coup en vue
En début de soirée, l'armée a été appelée en renfort et des soldats non armés ont commencé à se déployer dans la capitale autour du quartier du Parlement et du siège du gouvernement.
Le chef de l'armée, le général Anupong Paojinda, a demandé à la population de "ne pas paniquer", assurant que ses troupes ne fomenteraient pas un "coup d'Etat".
Au moins quatre policiers ont été blessés par balle et quatre autres ont reçu des coups de couteau, a précisé la police.
Un hôpital a confirmé la mort d'une manifestante âgée d'une vingtaine d'années. Un homme a aussi été tué par l'explosion d'une bombe dans une jeep Cherokee non loin du Parlement, selon un colonel, qui n'a pas formellement lié ce décès aux désordres.
Un centre national d'urgence a actualisé le bilan des violences de la journée, faisant état de 410 blessés, dont 49 hospitalisés.
La reine inquiète
La Reine Sirikit a fait part de son inquiétude. Elle a offert 100.000 bahts pour payer les soins des blessés. Chavalit Yongchayudh, le vice-Premier ministre, qui était en charge des négociations avec les protestataires, a annoncé sa démission, affirmant que le recours à la force "n'était pas conforme"à ce qu'il avait "promis".
En dépit de la gravité de la situation, le Premier ministre thaïlandais Somchai Wongsawat, élu il y a à peine trois semaines au Parlement, a refusé d'envisager la proclamation de l'état d'urgence excluant également toute démission pour l'instant.
A la tombée de la nuit, la plupart des manifestants sont retournés dans leur campement devant les bureaux du Premier ministre. L'APD a juré de poursuivre son mouvement tant que le Parti du pouvoir du peuple (PPP) serait au gouvernement.
La tension politique est remontée en Thaïlande lorsque deux leaders de la PAD ont été arrêtés séparément vendredi et dimanche.
P.Q. et E.M. avec AFP mercredi 8 octobre 2008