Des Thaïlandais publiant un magazine écrit intégralement en français, l'initiative mérite d'être soulignée ! Les apprentis journalistes sont étudiants à la faculté de Lettres de Chulalongkorn et approfondissent leur connaissance de la langue de Molière - et du reporter Rouletabille - en éditant deux fois par an L'Amateur, une compilation d'articles lancée en 2002
Ambiance studieuse à la faculté de Lettres de l'Université Chulalongkorn en ce vendredi après-midi. Les dix élèves thaïlandais présents à l'atelier de journalisme planchent sur le magazine universitaire L'Amateur, avec l'aide de leur professeur, le rédacteur en chef du mensuel Gavroche, Philippe Plénacoste.
L'équipe est tendue, car il reste à peine deux mois pour remplir les vingt pages du journal. Mais les étudiants, en troisième et quatrième année de français ou de sciences politiques, entendent bien remplir le contrat. « C'est un vrai défi pour nous, avoue Pime qui planche sur l'évolution de l'apprentissage du français en Thaïlande. Avec L'Amateur, on a l'occasion de présenter concrètement notre travail. »
Les apprentis journalistes, qui ont choisi leurs sujets, se donnent d'ailleurs la peine de faire du journal le reflet de la société thaïlandaise actuelle. C'est ainsi que les lecteurs du prochain numéro de l'Amateur pourront notamment découvrir les secrets de fabrication du Ja Mongkut ce dessert traditionnel thaïlandais en voie de disparition, savoir ce qui se cache derrière la folie du Jatukhram, dernière amulette en vogue, ou encore lire une enquête sur l'utilité de la censure au cinéma.
Une initiative étudiante devenue projet universitaire
L'Amateur, avant même d'être baptisé ainsi, est né d'étudiants qui voulaient monter un journal en langue française. "Le journal est une initiative étudiante qui remonte à 2002, se souvient le coordinateur du projet, le professeur Paniti. Les élèves du département de français envisageaient de créer une revue pour écrire en français."
La faculté a décidé ensuite d'en faire l'outil d'un nouvel atelier, celui d'écriture journalistique. L'idée est soumise en 2004 à Philippe Plénacoste, qui accepte de prendre la tête du cours. Dès l'année suivante, après des changements de maquette et de ligne éditoriale (le recueil de jeux devient compilation des articles écrits pendant le semestre), L'Amateur décroche une bourse thaïlandaise qui lui permet d'être imprimé à un millier d'exemplaires au lieu des 500 prévus. Car le projet séduit.
"Nous cherchons à créer un pont entre le monde professionnel francophone et ces jeunes qui n'utilisent le français que pour les dissertations et mémoires, explique Philippe Plénacoste."Les méthodes de l'atelier sont d'ailleurs différentes de celles des autres cours de français. "On travaille en groupe pour partager nos avis sur les sujets, explique l'étudiante Prisly."
Les rédacteurs semblent donc satisfaits de leur travail, comme le sont les lecteurs. "C'est un journal digne de professionnels !, se réjouit Ajarn Paniti. Même si Philippe Plénacoste reconnaît que les sujets choisis pourraient être sélectionnés pour de « vraies » publications, il estime que le style d'écriture utilisé reste universitaire.
A défaut d'être le concurrent du Nouvel Obs ou du Point, L'Amateur est en tout cas une belle initiative thaïlandaise pour le développement de la francophonie dans le Royaume.
Caroline TRONCHE (www.lepetitjournal.com Bangkok) mardi 11 septembre 2007
L'Amateur est distribué dans les départements de français des universités de Thaïlande, dans certains lycées et consultable à la médiathèque de l'Alliance française