Depuis 40 ans la Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial de cacao. Malgré ce statut, le pays peine à profiter des avantages qui y sont liés et doit également faire face à la déforestation engendrée par la cacaoculture. La Banque Mondiale a récemment proposé diverses solutions à ce sujet dans un rapport nommé « Au pays du cacao, comment transformer la Côte d’Ivoire ».
Depuis 1960, la production mondiale de cacao a été multipliée par 3 passant de 1,2 à 3,6 millions de tonnes. La Côte d’Ivoire assure 40% de la production mondiale et mobilise près de 1 million de producteurs. De plus, la filière fournit 14% du PIB, le tiers des recettes d’exportation et finance 10% du budget de l’Etat. Bref, le cacao occupe une place centrale dans la société ivoirienne et pour de nombreuses familles.
Malgré son importance au sein de l’économie et de la société ivoirienne, la filière du cacao ne répond pas aux objectifs attendus quant à son rôle dans le développement économique. Certains vont jusqu’à parler de la malédiction du cacao. Le rapport de la banque mondiale identifie trois raisons :
- Plus de 50% des producteurs de cacao vivent en deçà du seuil de pauvreté (Moins de 757Fcfa / jour).
- Destruction des forêts dû à l’expansion des surfaces cultivées (Environ 90% des aires protégées se sont transformées en cultures de cacao).
- Une faible part perçue par la Côte d’Ivoire dans la valeur globale ajoutée de la filière (Entre 5% et 7%).
Si le cacao est très largement produit dans les pays en développement comme la Côte d’Ivoire, les produits dérivés sont principalement consommés dans les pays industrialisés ; les acheteurs de ces pays étant essentiellement l’industrie chocolatière de transformation et de confection.
Cependant le pays n’encaisse que 7% des gains réalisés au niveau de la chaîne, le solde étant partagé entre les acteurs de la transformation et de la fabrication de produits finis chocolatés.
Les habitudes de consommations évoluant il faudra une refonte de la filière pour être en accord avec les changements qui s’annoncent. Les consommateurs sont plus exigeants sur l’origine, les conditions de production du cacao et plus sensibles quant à la protection de l’environnement et le travail infantile.
Jusqu’à présent la stratégie ivoirienne pour répondre à la hausse de la demande à été l’expansion des exploitations. Une solution qui touche à son terme la Côte d’Ivoire ne disposant plus de terres pour accroître la culture du cacao. « Le verger existant vieillit, souffre d’épidémies et devra être remplacé rapidement » selon le rapport de la banque mondiale.
Pour endiguer la catastrophe à venir, la banque mondiale soumet quatre aménagements possibles :
- Augmenter la productivité des plantations existantes et stopper l’expansion afin de préserver les forêts encore existantes.
Certaines entreprises travaillent déjà en ce sens tel que le groupe Barry Callebaut (SACO) et son projet « Forever Chocolate » qui vise à faire perdurer la production de cacao dans le respect de l’environnement et en améliorant les conditions de vie des planteurs.
- Transformer la matière première pour monter en gamme dans la chaine de valeur du cacao. Vendre le chocolat industriel et non plus les fèves.
Cela existe déjà en Côte d’Ivoire, avec la SACO évidemment, Cargill autre gros broyeur sur la place ou encore le français Cémoi. Mais également à de plus petit niveau avec Choco+, une association basée à Grand-Bassam qui enseigne le savoir-faire de la transformation aux jeunes et produit son propre chocolat. Ou encore MonChoco, chocolatier artisanal basé à Abidjan.
- Améliorer la politique de taxation de la filière cacao et ainsi permettre aux producteurs de profiter du fruit de leur travail.
La Côte d’Ivoire a depuis très longtemps mis en place une taxe sur ses exportations de cacao, l’une des plus fortes au monde. « Un tel niveau de taxation au niveau de l’exportation, qui se transmet intégralement au niveau bord-champ, se traduit par une taxation d’environ 40% du chiffre d’affaires du planteur, et probablement de plus de 50% sur ses bénéfices », indique la Banque mondiale. Cet instrument est particulièrement important pour la Côte d’ivoire car il lui procure de très importantes recettes fiscales, jusqu’à 10% du budget de l’État.
- Se doter d’un système de suivi et de prévision efficace. Avoir une connaissance précise du verger Ivoirien et de la population des planteurs de cacao. Aujourd’hui les prévisions du Conseil Café Cacao ne concerne que le volume de production attendu et reste peu fiable même à court terme.
« Dans le cadre de sa nouvelle stratégie, le CCC a récemment lancé le recensement exhaustif du verger cacaoyer national (y-compris au sein des zones protégées) et des producteurs de cacao ; et la préparation d’un modèle de prévision à court et moyen terme intégrant les variables essentielles (évolution des superficies et de la productivité, conditions climatiques, prix international, etc.). Ce travail fournira l’outil dont le gouvernement a besoin pour assurer la gestion d’un secteur aussi stratégique. » assure la banque mondiale.